Ventes flash : comment les marques organisent des pénuries pour nous faire acheter

par Hamza HIZZIR | Reportage TF1 Matthieu Poissonnet, Florian Le Goïc
Publié le 18 décembre 2023 à 11h53

Source : JT 20h WE

Avec les vacances de Noël qui arrivent, c'est la course aux cadeaux.
Mais les consommateurs ont-ils toujours conscience des stratégies déployées par les marques ?
La multiplication des promotions à quelques semaines des fêtes n'a rien d’innocent, comme le montre ce reportage de TF1.

Ils n’ont jamais été aussi pressés de dépenser 360 euros. Dans le supermarché Lidl de Croissy-Beaubourg (Seine-et-Marne), la mise en vente d’un robot cuiseur, à prix cassé et en quantité très limitée, provoque d’impressionnants mouvements de foule dès l’ouverture, ce dimanche matin. "On a tenté le coup le premier jour parce qu’on s’est dit que plus tard dans la semaine, il n’y aurait plus rien", explique une cliente. "J’ai envoyé mon mari dans un autre Lidl pour essayer d’en avoir un, on voulait absolument l’avoir, donc je suis trop contente", se réjouit une autre. L’enseigne proposait aux 100.000 premiers clients de se faire rembourser le montant de l’appareil en bons d’achat.

Une demi-heure après l’ouverture du magasin, il n’y a déjà plus de stock dans l’arrière-boutique. "C’est parti très, très vite aujourd’hui, on ne s’attendait pas à un aussi gros afflux de clients, on est très satisfaits de l’opération", réagit Adrien Tournemolle, le directeur du supermarché. Les clients sont tellement fiers de s’être procuré l'appareil, que certains partagent leur succès sur les réseaux sociaux. Mode, alimentation, électroménager… À l’approche de Noël, toutes les marques, dans tous les secteurs, se mettent aux ventes flash. Ce n’est évidemment pas anodin.

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"Ça crée des besoins chez le consommateur, qu’il n’a pas forcément au départ. Avec des ventes flash de deux heures à un instant T dans quelques lieux donnés, les marques vont créer un sentiment d’urgence, pour que le consommateur se rue dessus", décrypte Amélie Clauzel, maître de conférences HDR à l'Université Paris Panthéon Sorbonne, spécialiste du comportement du consommateur. Dit autrement : en limitant volontairement les quantités, la question n'est plus "ai-je besoin du produit ?", mais plutôt "ne vais-je pas arriver trop tard ?".

L’expert en veille tarifaire Minderest théorise ainsi cette stratégie de vente sur son site Internet : "Pendant le laps de temps où le consommateur se demande s’il va acheter ou non un produit, vous pouvez appliquer certaines techniques pour accélérer la décision d’achat finale. Parmi elles on distingue les tactiques de pénurie et d’urgence qui font appel aux sentiments de besoin et d’exclusivité des clients. (…) Il a été démontré que le fait de créer un sentiment d’urgence provoque une attitude plus compétitive et légèrement agressive chez le consommateur qui ne veut pas rater l’occasion d’acheter un bon produit à un bon prix."

"Pour que ces stratégies fonctionnent, vous devez combiner des prix alléchants et des appels puissants, peut-on encore y lire. Le but ultime est d'animer les acheteurs potentiels à profiter d’une opportunité unique qui est limitée dans le temps et en quantité. Annoncer une bonne remise pendant un temps limité créera un plus grand intérêt que le lancement d’une campagne d’offres prolongée dans le temps. Plus la période des offres sera courte, plus le sentiment d’urgence créé sera fort. Aussi vous faut-il toujours indiquer quand se termine la promotion." Certains eCommerces comme Amazon affichent même un compte à rebours.

Plus largement, il suffit qu’un produit soit rare, voire exceptionnel, pour que nous souhaitions l'acquérir. C’est pourquoi de nombreuses marques de textile ouvrent désormais des boutiques éphémères, des pop-up stores dans le jargon, où elles proposent plusieurs dizaines d’articles que vous ne trouverez nulle part ailleurs, souvent plus chers que le reste des gammes. 

Comme un bon vin, plusieurs produits, vendus en édition limitée, voient même leur valeur s'envoler au fil du temps. C’est, par exemple, le cas des baskets, dont les collections les plus recherchées alimentent un marché parallèle. L’entreprise Wethenew a donc fait sa spécialité de racheter dans sa boutique parisienne les paires les plus prisées à des particuliers, pour les revendre à des prix stratosphériques sur son site. "Je me doutais que ces chaussures allaient prendre de la valeur. Je les avais gardées pour les revendre, sourit un jeune homme. Je les avais eues à 100 euros il y a trois ans, et là je les ai revendues 1.200 euros."


Hamza HIZZIR | Reportage TF1 Matthieu Poissonnet, Florian Le Goïc

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