VIDÉO - Gilles Lellouche et Mélanie Thierry "entre la survie et la contemplation" dans "Soudain seuls"

Publié le 6 décembre 2023 à 8h00, mis à jour le 6 décembre 2023 à 13h45

Source : TF1 Info

Gilles Lellouche et Mélanie Thierry jouent un couple de Français pris au piège d’une île déserte dans "Soudain seuls", le nouveau film de Thomas Bidegain.
Une adaptation ambitieuse du roman de la navigatrice Isabelle Autissier qui mêle grand spectacle et drame intimiste.
Mis à rude lors du tournage, les deux comédiens ont raconté cette expérience hors norme à TF1info.

C’est un couple inédit au cinéma que réunit Thomas Bidegain dans Soudain seuls, son deuxième film, adapté du roman de la navigatrice Isabelle Autissier. Gilles Lellouche et Mélanie Thierry sont Ben et Laura, deux Français lancés dans un tour du monde sur les mers. Alors qu’ils ont fait escale sur une île sauvage, près des côtes antarctiques, leur bateau disparaît suite à une terrible tempête. Confrontés à une nature hostile, leur couple va être mis à rude épreuve, au propre comme au figuré. TF1 est allé à la rencontre de ce duo qui a failli ne jamais voir le jour puisque le réalisateur devait au départ tourner ce film étonnant avec deux stars hollywoodiennes très en vue…

Soudain seuls mélange le thriller de survie à l’anglo-saxonne à un drame plus intimiste à la française. C’est ça qui vous a séduit dans ce projet ? 

Mélanie Thierry : Oui, moi c’était la promesse d’un film d’aventure qui me plaisait, avec la possibilité de pouvoir s’approcher au plus près des personnages et d’être dans la complexité des sentiments. Surtout dans un contexte aussi hostile. Parce que ce sont un peu Monsieur et Madame tout le monde, échoués sur une île déserte. D’ailleurs je ne cesse de me demander si j’aurais fait mieux qu’eux…

Gilles Lellouche : Moi je n’aurais fait que moins bien, c’est sûr ! (Sourire). C’est vrai que ce film, c’est une proposition qui n’est pas fréquente en France. Moi j’adore le mélange des genres au cinéma. Là il y a l’ampleur du récit d’aventure, avec ce côté chirurgical sur la crise d’un couple. Comment on se brise, comment on se répare. Comment on se fait mal. Comment on s’aime, comment on se déchire. Comment on se retrouve, comment on s’aide. Il y a une espèce de valse dans les sentiments qu’ils traversent que je trouve merveilleuse. L’âpreté de ce film, je la trouve courageuse. Et vraiment belle.

Mélanie Thierry dans "Soudain Seuls" : "Un tournage extrême qui m'a décomplexé"Source : TF1 Info

Au départ ce sont Jake Gyllenhaal et Vanessa Kirby qui devaient tenir vos rôles dans un film que Thomas Bidegain voulait tourner en anglais. Est-ce que vous leur dites merci d’avoir renoncé ? 

Gilles : Ah oui !

Mélanie : Ce qui est pas mal avec des acteurs français, c’est de ne pas être que dans le sensationnel et l’héroïsme. De revenir à quelque chose de plus humain. Tu ne dirais pas ça ?

Gilles : Oui et de moins cher aussi ! (Rires). Ce qui est marrant, c'est que j’étais au courant de ce projet il y a longtemps, justement lorsque c’était Jake Gyllenhaal et Vanessa Kirby au casting. Et je me disais "Ah quelle chance, quel rêve de faire un film comme ça ! Cette histoire d’amour sur une île déserte, ça c’est un projet que j’aurais aimé faire !". Et là… Bam ! Ça nous tombe dessus ! Et ça, c’est plutôt chouette.

En regardant le film, on se demande si vous en avez un peu bavé lors du tournage en Islande…

Gilles : On avait une petite caravane, pas hyper chauffée. Mais ce n’est jamais suffisant vu comme il fait froid là-bas. Après je ne vais pas faire le superhéros non plus vu que la soirée on rentrait dans des appartements avec de l’eau chaude. Mais la journée, les nuits aussi où on tournait, toute l’équipe était propulsée dans une nature au-delà de l’hostile. Avec un vent de 200 km/h qui combiné à la pluie vous lacère le visage comme des lames de couteau. Mais la juste récompense, la caresse, c’est tout à coup une aurore boréale de 10 kilomètres de long dans le ciel. Et là c’est absolument exceptionnel. On était donc dans un état de survie nous-mêmes, mélangé à une espèce de contemplation permanente de cette nature aussi belle que rude.

Si on résigne et qu’on va tous se cacher sur une plage, on est mal barrés !
Gilles Lellouche

Soudains seuls raconte de manière extrême ce fantasme des occidentaux qui rêvent de partir loin du monde, des gens, des portables, etc. Est-ce que c’est une tentation que vous avez aussi l’un et l’autre ? 

Mélanie : Moi je dirais que je suis un peu casanière. Je manque un peu de témérité en règle générale. Mais dès qu’il s’agit de m’engager sur un tournage et d’avoir la foi dans le projet, c’est comme si tout à coup ça me décomplexait. Comme si je ne soupçonnais pas les ressources que je pouvais avoir. Et j’aime bien ça. Devoir quitter le cocon parisien où j’ai l’impression qu’on me cajole, et me dire que je me fais un peu violence en me frottant à un genre que je ne connais pas, à des expériences, à des aventures comme celle-là.

Gilles : La tentation du bout du monde, oui. Mais pas pour me couper du monde. Pour voir le monde, tout simplement. Je n’ai pas envie de me couper de mes contemporains, des gens que j’aime. Quoi qu’en ce moment, ça ne me dérangerait pas trop…

Gilles, il y a quelques mois nous parlions ensemble de la résurgence de l’antisémitisme à l’occasion de la sortie de Adieu Monsieur Haffmann. Que vous inspire l’actualité depuis le 7 octobre ? Vous avez envie de hurler ? De manifester ? Ou peut-être de vous replier sur vous-même ?

Me replier sur moi-même, je ne vois pas pourquoi. Hurler non plus. Je suis juste affligé de la manière dont aujourd’hui beaucoup profitent de ce qu’il se passe dans le monde pour déverser leur haine. Qu’elle soit antisémite, raciste, anticatholique ou antimusulman. Il y a une espèce de possibilité de dire le pire que je trouve abjecte et impardonnable. On peut avoir des avis sur le conflit au Moyen-Orient. Évidemment. On peut soutenir, évidemment. Mais en profiter pour déverser sa haine et sa bile, je trouve que c’est abject parce que ça raconte quelque chose qui couvait, qui était là, qui n’attendait qu’à jaillir. Cette bête immonde, encore, encore et encore. C’est dramatique et on est tous embarqués dans cette horreur, ce cauchemar qu’on ne contrôle pas, qui nous file entre les doigts. Cette époque qui semble totalement incontrôlable et incontrôlée. C’est ce qui est assez effrayant.

Pour les artistes, prendre position, c’est beaucoup de coups à prendre ? 

Il n’y a pas de coups à prendre. Parce qu’il n’y a pas de camps à choisir. Enfin de mon point de vue. Il y a la réalité des faits et il faut faire avec. Mais vous savez, l’injonction à choisir son camp, elle est folle. On ne devrait en avoir qu’un et c’est le débat pour la paix. Ni plus ni moins. Donc les coups à prendre… Hélas, on les prend tous les jours que Dieu fait en ce moment. Que Dieu ou quelqu’un d’autre.

Ça donne encore plus envie de partir au bout du monde, non ? 

Oui mais non parce qu’on a aussi des enfants. Pour eux, il faut essayer d’avoir une colonne vertébrale et essayer de regarder le monde en face. Essayer de lui trouver encore de la lumière. Une possibilité de mieux. Autrement, si on résigne et qu’on va tous se cacher sur une plage, on est mal barrés !

Mélanie, vous êtes d’accord avec Gilles ?

Oui et moi j’ai juste la sensation que nos démocraties sont terriblement en danger. Comme jamais. Or j’ai aussi la sensation qu’on n’a rien inventé de mieux que la démocratie pour que tout le monde se respecte et qu’on puisse bien vivre ensemble. Donc ça tourmente un petit peu. Et même plus qu’un peu.

>> Soudains Seuls de Thomas Bidegain. Avec Gilles Lellouche et Mélanie Thierry. 1h50. En salles mercredi.


Jérôme VERMELIN

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