Le 13H de TF1 a dévoilé en exclusivité ce jeudi "Un cri", un morceau inédit de Johnny Hallyday.
Son auteur, le compositeur et producteur Maxim Nucci, alias Yodelice, nous raconte l’histoire de cette chanson enregistrée en février 2017 avant d'être laissée de côté, puis retrouvée.

À l'approche de la date anniversaire de sa disparition, le 5 décembre 2017, Johnny Hallyday revient dans l'actualité ce jeudi avec la révélation d'un morceau inédit : Un cri. Ce morceau, que le 13H de TF1 a dévoilé en exclusivité (dans la vidéo en tête de cet article, des fans inconditionnels très émus réagissent après l'avoir écouté en avant-première), a été composé et réalisé par Yodelice, un des complices (guitariste-producteur) des dernières années du chanteur. 

La chanson figure au cœur de "Made in Rock'n'Roll", album qui compile dix autres titres déjà connus du "Taulier", remastérisés pour l'occasion. L'ensemble, très rock, est publié vendredi chez Parlophone, label dans la galaxie Warner, dernière maison de disques de la star. Maxim Nucci, alias Yodelice, nous raconte la genèse de ce morceau.

Ce morceau a été enregistré quand, où et dans quelles circonstances ?

Yodelice : Cette chanson a été enregistrée en février 2017 dans un studio à Santa Monica, proche de l'endroit où vivait Johnny à Los Angeles. C'était à un moment où il avait appris sa maladie très peu de temps avant, et il voulait très vite se mettre au travail, se raccrocher à de la musique, à la perspective d'un album, d'une tournée... Donc, c'était un moment qui était vraiment entre deux albums, où je suis venu à titre amical passer du temps avec lui et faire de la musique.  

Les thèmes de la chanson - le secret, la souffrance - sont-ils en rapport avec la maladie qui touchait Johnny ? 

Non, je ne pense pas que le fond du texte ait un rapport avec l'état de santé de Johnny à ce moment-là. D'autant plus qu'il était en pleine forme. Sur cette chanson, il s'est toutefois passé quelque chose d'assez inédit dans sa carrière, notamment le fait qu'il pose ses voix sur des maquettes. J'imagine que, dans les années 60, Johnny répétait son répertoire avec les musiciens, il rentrait en studio, ça appuyait sur record et en live, il enregistrait la chanson. Dans les années 80-90-2000, on soumettait un répertoire à Johnny, on l'orchestrait et, une fois que la musique était faite, il venait en studio poser sa voix. Durant la dizaine d'années où je l'ai accompagné et pour les quatre albums sur lesquels j'ai travaillé, c'était assez rare qu'il vienne poser sa voix sur un titre inabouti. Là, il l'a fait sur un "guitare voix" maquetté vite fait. Une idée de chanson qui n'était pas une chanson finie en termes d'orchestration. Donc, il y avait chez lui une vraie volonté et une vraie envie de chanter, comme d'enregistrer rapidement. 

Je me dis qu'il faut partager ce morceau avec les gens qui l'aiment et ne pas le garder sur un disque dur...
Yodelice

Pourtant, ce morceau n'a pas été publié en 2017. Que s'est-il passé à l'époque ?

Ce titre, c'était le début de l'enregistrement de l'album Mon pays, c'est l'amour, sorti à titre posthume. Et c'est un album dont l'enregistrement était particulier, intense émotionnellement. Je suis le type de musicien qui aime bien avoir un plan ou l'idée d'une direction artistique lorsque je travaille avec un artiste, et ce, dès la genèse des musiques et des premières notes. Là, il est vrai qu'on allait plus à tâtons, dans l'urgence de faire de la musique, soit une impulsion donnée par Johnny. Cette chanson, c'était un morceau blues qui ressemblait plus à l'album De l'amour que je lui avais fait avant. Là, pour ce dernier album, il voulait quelque chose d'épique et finalement, la chanson Un Cri ne rentrait pas vraiment dans la direction artistique - je le dis a posteriori, car sur le moment, on n'intellectualise pas ce qui se passe. Ainsi, cette chanson a été mise de côté. Volontairement ou pas, je n'en sais rien. C'est juste qu'il n'y a pas eu réellement le temps de la réflexion. On a avancé, des chansons prenaient plus le pas que d'autres... Celle-ci était restée dans un état de "guitare-voix" de maquette. 

Comment a eu lieu sa renaissance ?

Le nouveau patron à la tête du label Warner s'est mis en quête de savoir à peu près ce qu'il avait à sa disposition dans les disques durs, et il a retrouvé la trace de ce morceau. Il a alors contacté un de mes collaborateurs. Au départ, je n'étais pas hyper enjoué ni excité par la perspective de me remettre au travail sur une voix de Johnny, le dernier enregistrement de son album ayant été un traumatisme pour moi. Mais c'était pendant l'anniversaire de Johnny. Je ne suis pas très actif sur les réseaux sociaux, mais il s'avère que là, j'ai posté une photo de lui en disant que je pensais à lui et j'ai par la suite reçu des centaines et des centaines de messages de fans qui me disaient à quel point Johnny leur manquait. Je décide alors d'ouvrir la session, je mets tout de suite la voix de Johnny en solo, je prends une guitare et c'est fou, parce que j'ai à ce moment-là l'impression de refaire de la musique avec lui aujourd'hui, six ans après son départ. Je prends un plaisir inouï, je finis l'orchestration et je me dis qu'il faut partager ce morceau avec les gens qui l'aiment et ne pas le garder sur un disque dur...   

De mon travail avec Johnny, c'était la dernière chanson
Yodelice

Ce plaisir pris est évident à l'écoute de ce morceau et on pense évidemment à l'album De l'amour. Avez-vous l'impression à l'écoute, avec un peu de recul, qu'Un Cri représente aussi ce qu'il était ?

Impossible pour moi de résumer Johnny à une chanson, mais ce qui est sûr, c'est que ça correspond au travail qu'il me demandait de faire à ses côtés sur les disques. Il voulait absolument un retour aux sources, un retour de la musique qui lui a donné envie d'en faire, à Elvis, à Gene Vincent, au mouvement rock-rockabilly des années 60. Ce texte aujourd'hui prend une signification plus forte qu'à l'époque avec ce premier couplet qui raconte l'histoire d'un homme qui s'est fait tout seul, qui a dû se bagarrer pour y arriver... Ce phénomène qui s'est inventé un nom, une identité... Un super héros qu'il a incarné tellement fort qu'il l'est devenu lui-même. Et puis avec ce deuxième couplet, qui est une déclaration d'amour à l'Amérique, à ces symboles qui vont de James Dean à Dennis Hopper. C'est d'ailleurs quelque chose qui nous a rapprochés, lui et moi. On partageait cette passion pour l'Amérique fantasmée, avec des héros qui n'existent plus. Donc oui, ce Cri, c'est un vrai Hallyday.  

La question que se posent tous les fans : savez-vous s'il reste d'autres chansons inédites ?  

À ma connaissance, non. De mon travail avec Johnny, c'était la dernière chanson et j'ai l'impression d'avoir fini une boucle. Autrement dit, la boucle est bouclée. J'avais l'impression d'avoir fini à la sortie de l'album Mon pays, c'est l'amour. Mais non, j'ai eu cette surprise six ans après et je suis ravi de partager cette chanson avec les gens qui aiment Johnny.  


La rédaction de TF1info | Propos recueillis par Sylvain Millanvoye et retranscrits par Romain Le Vern

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