L'annonce de la victoire de Lula au Brésil dans la nuit de dimanche à lundi a été saluée à travers le pays.Si les images de célébrations ne manquent pas, certains détournent de vieilles vidéos.On fait le tour des fausses images qui circulent en ligne.
Rires et manifestations de joie ont déferlé sur le Brésil ce dimanche 30 octobre au soir à l'annonce de la victoire du président Lula da Silva. Enveloppés dans des drapeaux, enchainant les chants festifs, des centaines de milliers de militants se sont notamment retrouvés à Sao Paulo pour fêter le retour au pouvoir de l'homme de gauche. Mais au-delà de ces images réjouissantes, des internautes pensent savoir que les célébrations sont allées encore plus loin.
Trois vidéos, trois fausses infos
À l'instar du porte-parole de La jeune garde antifasciste. Sur Twitter, celui qui porte la voix de ce collectif a souligné ce lundi matin que "dégager l’extrême droite" du pouvoir rend "très heureux". Pour preuve, il a mis en ligne une vidéo de feux d'artifice assez nombreux pour teindre le ciel de pourpre. Des images qui auraient été capturées "cette nuit dans le Nordeste", fief du candidat du Parti travailliste, "pour fêter la victoire de Lula et la défaite de Bolsonaro". Sauf qu'une recherche d'image inversée nous permet de rapidement mettre la main sur d'autres occurrences de ces images. On les retrouve notamment sur YouTube, le 28 octobre 2020. Là, en légende, l'internaute explique que ces feux d'artifice n'ont pas été tirés au Brésil, mais en Croatie. Et qu'ils n'ont rien à voir avec la politique. Le spectacle a en fait eu lieu lors du 70ᵉ anniversaire du "Tordica Split", un groupe de supporters d'un club de foot en Croatie. On retrouve effectivement ces images sur un site d'actualité footballistique, mais aussi sur le compte YouTube officiel de ce groupe. Dans la matinée, l'auteur du tweet trompeur avait retiré sa publication, sans expliquer son erreur.
Si certains se réjouissent du retour de l'ancien ouvrier au pouvoir, d'autres s'en inquiètent. Et vont jusqu'à l'accuser d'avoir été élu par des "criminels". Pour défendre cette rumeur, une énième vidéo a fait son apparition sur les réseaux sociaux. Dans le Nord-Est du Brésil, des "narcotrafiquants" auraient "célébré la victoire de Lula en tirant en l'air". Sur les images, une foule compacte crie en tirant des coups de feu. Encore une fois, la séquence n'a strictement rien à voir avec l'élection qui s'est tenue au Brésil. Nous avons observé la présence de cette vidéo en ligne à plusieurs reprises. Si nous ne sommes pas arrivés à remonter jusqu'à son origine, on en retrouve trace dès le 27 septembre 2019. Soit, lorsque Jair Bolsonaro était encore au pouvoir.
Si la première séquence est issue des rangs de Lula et la seconde tient plutôt à le décrédibiliser, une troisième publication a quant à elle été détournée… par les deux camps ! Sur les images, on voit environ une centaine de personnes arrêtées par les forces de l'ordre et placées en ligne face à trois bus, les mains derrière la tête. Selon le camp Bolsonaro, il s'agirait de militants du MST - le Mouvement des travailleurs ruraux sans terre (MST), défenseurs de Lula - qui attendraient la victoire pour "envahir des terres". Et d'après leurs opposants, les images prouvent au contraire que la police est intervenue "pour stopper les électeurs qui se rendent massivement dans les bureaux acquis à Lula".
Ce n'est ni l'un, ni l'autre. La scène a en réalité été tournée il y a plus de six mois. Comme l'avaient déjà expliqué les forces de l'ordre à l'AFP en avril dernier, la police a en fait réalisé ce "contrôle de routine" auprès de supporters du Sport Club do Recife. Le groupe se rendait en nombre à la finale de la "Coupe du Nord-Est de football", une compétition sportive qui avait lieu le 3 avril. D'ailleurs, au moment de cette intervention, le club qui s'opposait au Fortaleza Esporte Clube avait remercié la police militaire sur Facebook pour cette fouille effectuée "avec respect".
En résumé, la gauche comme l'extrême droite se sont emparées de vieilles vidéos pour les détourner et décrédibiliser leur adversaire. Un phénomène à l'image de cette campagne tout à fait particulière qui s'est tenue au Brésil, lors de laquelle les deux camps se sont opposés sur le champ de la désinformation.
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