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Chine : que sait-on de ces images d'ouvriers semblant s'échapper de leur usine à Shanghai ?

Publié le 11 mai 2022 à 17h32, mis à jour le 14 mai 2022 à 21h54

Source : JT 20h WE

Des images tournées aux abords d'une usine de Shanghai montrent des ouvriers au cœur d'une véritable cohue.
Ils sont présentés en ligne comme cherchant à s'échapper, en marge du confinement très strict imposé dans la ville.
Passées sous silence en Chine, ces scènes montreraient en réalité des ouvriers tentant de rejoindre la zone de leurs dortoirs, après un mouvement de panique.

En l'espace de 24 heures, ces images ont été visionnées plus de 600.000 fois. Une vidéo d'à peine plus de 10 secondes montre une forme de cohue aux abords de ce qui est présenté comme une usine de Shanghai, sous-traitante d'Apple. De jeunes hommes et femmes enjambent des portiques de sécurité, contournent les membres de la sécurité et s'affairent en courant, sans que l'on en sache davantage sur leur destination. 

"Plusieurs centaines de jeunes employés de l'usine Quanta, fournisseur principal d'Apple pour ses macs, se sont échappés en sautant par-dessus les barrières autour de l’usine, en confinement strict depuis plus d’un mois", peut-on lire en légende. Il s'agit ici de la reprise d'un message Twitter posté par les membres du bureau de France Télévisions en Chine, avare lui aussi en éléments de contexte. 

Des salariés qui vivent en marge de leur usine

Ces salariés cherchent-ils vraiment à fuir ? Si oui, vers où se dirigent-ils ? Pour tenter d'y voir plus clair, il faut se pencher sur les informations relayées par les médias sinophones. Ces derniers, depuis Taïwan notamment, confirment qu'il s'agit bien d'une séquence tournée à Shanghai, sur le site d'une usine de la firme Quanta. En revanche, comme l'indique une dépêche de l'agence Reuters, les raisons de ce mouvement de foule ne sont pas celles auxquelles l'on pourrait s'attendre. En effet, les personnes ici filmées, si elles ont bien quitté leur poste de travail, auraient avant tout cherché à rejoindre leurs dortoirs adjacents. 

 Il faut souligner que pour éviter une paralysie totale de l'économie, de nombreux ouvriers sont invités à poursuivre leur activité, tout en faisant partie d'une forme de "bulle". Plutôt de que rentrer chez eux le soir et de risquer d'importer le virus au travail, ils sont hébergés sur place par leur employeur, aboutissant à la mise en place d'une "boucle fermée". Problème : en milieu de semaine dernière, les ouvriers auraient été effrayés "par un ordre leur disant de ne pas retourner dans leurs dortoirs, faisant craindre qu'ils ne soient enfermés à l'intérieur de l'usine". Des messages en chinois, postés sur la messagerie WeChat et relayés sur les réseaux sociaux, tendraient à confirmer cette version : "J'ai travaillé dans cette usine, cette route, c'est l'accès aux dortoirs", peut-on notamment lire. Sollicitée ce mercredi, la correspondante de TF1 en Chine, Justine Jankowski, note que les vidéos de ces mouvements de foule n'ont été diffusé par aucun média à l'intérieur du pays. 

Les tensions autour de l'usine sont compréhensibles, eu égard au strict confinement imposé par les autorités. Les ouvriers, sous couvert d'anonymat, ont par ailleurs exprimé des craintes quant à une recrudescence des cas dans leurs rangs. Malgré les mesures restrictives, des personnes auraient été nombreuses à se voir testées positives. "Chaque dortoir a signalé quelques cas positifs par jour, et finalement tout le monde est devenu positif", a rapporté un homme sous couvert d'anonymat, ajoutant que les firmes manquaient d'espaces libres pour isoler les ouvriers touchés et éviter la propagation du virus. 

Ces risques de contamination accrus, dans un contexte où les autorités se livrent à des actions d'envergure pour lutter contre l'épidémie, "a été un déclencheur du chaos de jeudi soir", souligne Reuters, évoquant des témoignages de travailleurs. Ces derniers ont ajouté que "des rumeurs se répandaient selon lesquelles des cas positifs avaient été découverts parmi ceux qui travaillaient dans les usines", ajoutant à la tension et l'anxiété ambiante.

D'autres scènes, filmées en marge de ces événements, illustrent les craintes des ouvriers. Sur le "campus" où ils sont rassemblés, on les voit se rendre en masse dans des supermarchés (installés à l'intérieur même de cette bulle sanitaire). Certains sont équipés de seaux et expliquent vouloir constituer des réserves de nourriture, alors que le bruit d'une fermeture de l'usine circule. Malgré la scène de "chaos" visible sur les images, il a été rapporté que la situation était rapidement revenue à la normale, et ce, dès le lendemain.

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Thomas DESZPOT

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