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VIDÉO - Présidentielle américaine : comment Donald Trump ressuscite QAnon et les théories complotistes

Publié le 22 décembre 2023 à 18h07, mis à jour le 7 janvier 2024 à 12h57

Source : TF1 Info

Un peu moins d'un an avant l'élection présidentielle 2024, la course à la Maison-Blanche a déjà démarré aux États-Unis.
En tête dans les sondages face à Joe Biden, Donald Trump multiplie les déclarations fracassantes et ressuscite la sphère QAnon, dont il s'érige en icône.
L'occasion de revenir sur les conséquences de cette mouvance complotiste dans la campagne électorale.

Une nouvelle course, mais pas de changement dans la stratégie. Empêtré dans les affaires judiciaires à moins d'un an de la présidentielle américaine 2024, Donald Trump cherche à redonner un second souffle à sa candidature. Et pour ce faire, il peut compter sur sa tactique habituelle : la désinformation. Une manœuvre par laquelle il réveille aussi la sphère QAnon et ses membres, dont les théories complotistes connaissent une résurgence et pèsent déjà de tout leur poids sur cette campagne.

Pour Q, une prophétie qui se réalise

Le retour de Trump, c'était justement l'une des prophéties de "Q", cette figure anonyme qui distille des rumeurs à la manière d'un mystérieux prophète. Après avoir longtemps crié que l'élection de 2020 avait été "volée" au milliardaire républicain, les adeptes de cette sphère ont défendu son retour pendant des mois. Et sont maintenant persuadés que les déboires du magnat de l'immobilier ne sont qu'une manière pour "l'État profond" de faire obstacle à sa (re)prise de pouvoir. 

Donald Trump, qui se contentait jusqu'alors de discrets clins d'œil, assume désormais ouvertement ses liens avec ces complotistes. "Il ne s'agit plus d'allusions subtiles, mais de remobiliser ceux qui voient en lui un héros et un sauveur en se mettant explicitement de leur côté", analyse Florian Cafiero, chercheur spécialiste de l'analyse des données web. 

En septembre 2022, lors d'un rassemblement dans l'Ohio, le candidat qui a fait de la "fake news" sa marque de fabrique avait par exemple tenu son discours en mettant à l'honneur une musique proche de l'hymne des QAnon. Toujours en septembre, le prédécesseur de Joe Biden avait partagé sur sa plateforme Truth Social un portrait de lui portant un pin's avec la lettre "Q" et ces trois mots : "la tempête arrive". Une référence claire à la théorie de QAnon selon laquelle la "tempête", à savoir la victoire finale de Donald Trump, lui permettra de reprendre les commandes et juger ses opposants. 

Au-delà du symbole, le calcul est surtout électoral. Par cette méthode, l'ex-président lance "un appel clair à reconstruire une communauté, qui chevauche les trumpistes durs et les membres du mouvement QAnon", résume Florian Cafeiro. 

La preuve la plus récente de cette stratégie : des photos postées le 19 décembre sur les réseaux sociaux où apparaissent notamment Marjorie Taylor Greene, elle aussi candidate à l'investiture républicaine, et Steve Bannon, ancien conseiller stratégique à la Maison-Blanche. Ces deux fidèles alliés de Trump posent avec Jake Angeli, activiste d'extrême droite connu de l'Amérique entière sous le nom de "QAnon Shaman" et qui a fait deux ans de prison pour avoir participé à l'assaut du Capitole

Donald Trump n'est pas le seul à avoir compris le bénéfice qu'il pouvait tirer de ce soutien en ligne. Un certain Robert Francis Kennedy, neveu de JFK, vient lui faire concurrence et draguer les voix de ces adeptes de la désinformation, assurant par exemple que le Covid-19 a été "ethniquement préparé". Pendant l'épidémie, cette figure de l'opposition à la vaccination ou aux restrictions avait enchaîné les meetings à travers le monde, au point de se hisser parmi les douze personnes à l'origine de 65% des fausses informations sur le Covid-19

Mais celui qui a bâti sa carrière politique en surfant sur la vague complotiste qui déferle sur l'Amérique ne s'est pas arrêté là. En pleine surenchère entre deux bouchées de pâtes, il avait mis en garde cet été contre l'arrivée d'"armes biologiques" plus terribles encore, assurant depuis un restaurant new-yorkais du très chic Upper East Side que les États-Unis seraient en train de développer "des armes biologiques ethniques" à partir de "l'ADN russe" en Ukraine. "Ils collectent l'ADN pour pouvoir cibler les gens en fonction de leur race", avait-il lancé plein d'aplomb.

QAnon se nourrit de l'insatisfaction de la société américaine
Florian Cafiero, ingénieur de recherche au Medialab

Résultat de cette course à la désinformation, de nombreux signaux montrent que l'élection sera encore plus marquée par les fake news et les théories complotistes défendues par QAnon. Et de fait, les thèses défendues par les adeptes de ce mouvement né en ligne en 2017, comme celle d'un État profond qui contrôlerait le monde ou de l'existence d'un trafic pédocriminel d'ampleur sur internet, influencent de plus en plus la société américaine. 

En cause, une hausse de "l'insatisfaction" au sein de la population, selon Florian Cafiero. Le chercheur au Medialab rappelle que ce discours de "remise en cause des élites, quelles qu'elles soient", s'appuie sur la multiplication des "crises sociales, économiques, des conflits et de la pandémie qui ont pu nourrir toutes ces insatisfactions". Si bien que depuis mars 2021, la part des personnes sensibles à ces idées est passée de 14% à 23%, selon un sondage publié le 25 octobre. Un constat édifiant : près d'un quart des citoyens américains adhèrent désormais à ces rumeurs.

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Felicia SIDERIS, Samira EL GADIR

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