Attentat d'Arras : le point sur l’enquête ce lundi soir

par Aurélie SARROT avec le service Police-Justice
Publié le 16 octobre 2023 à 20h20, mis à jour le 17 octobre 2023 à 9h16

Source : TF1 Info

Le 13 octobre, une attaque au couteau a eu lieu au lycée Gambetta à Arras (Pas-de-Calais).
Dominique Bernard, professeur de lettres, est décédé et trois personnes ont été blessées.
L’auteur présumé, Mohammed M., et quatre autres personnes étaient toujours en garde à vue ce lundi soir.

Les auditions se poursuivent. Trois jours après l’attaque au couteau commise au lycée Gambetta d’Arras qui a coûté la vie au professeur de lettres Dominique Bernard, et fait trois blessés, plusieurs personnes se trouvaient toujours en garde à vue ce lundi 16 octobre en fin de journée. 

Parmi elles, Mohammed M., l'assaillant présumé âgé de 20 ans, ainsi que plusieurs proches. TF1info fait le point sur l’enquête. 

L'assaillant contrôlé la veille de l’attaque

Né en 2003 à Malgobek, dans la République russe à majorité musulmane d'Ingouchie, Mohammed M. est arrivé en France en 2008, à l'âge de 5 ans. 

Il est fiché S depuis le 2 octobre 2013 après que la DGSI a eu connaissance d'informations selon lesquelles cet individu était en contact avec des personnes radicalisées. Cette surveillance - à base d'écoute et de géolocalisation - a été mise en place entre autres "parce qu'il y a eu des liens" entre lui et son frère Mosvar, toujours en détention aujourd'hui pour terrorisme, a expliqué le ministre de l'Intérieur. "Les conversations ne prévoyaient aucun attentat", a toutefois précisé Gérald Darmanin au 20H de TF1 vendredi, quelques heures après l'attaque à Arras. 

Pourtant, les enquêteurs se "doutaient de quelque chose", a poursuivi le ministre. Voilà pourquoi les policiers ont procédé jeudi, veille de l’assassinat, à l’interpellation de Mohammed M., pour "vérifier qu’il n’avait pas d’arme sur lui" notamment. "Il y avait une course contre-la-montre mais aucune menace, aucune arme, aucune indication. Nous avons fait notre travail extrêmement sérieusement à la DGSI", a assuré Gérald Darmanin, selon qui "il n'y a pas eu de faille des services de renseignements". "Il a manqué sans doute quelques heures", pour permettre aux enquêteurs d'exploiter ces techniques, a-t-il estimé samedi, ajoutant qu'il n'était cependant "pas certain" que l'auteur parlait sur son téléphone avant son passage à l'acte. 

"Rien dans les éléments qu'on avait pu obtenir ne permettait de prédire que cet individu (...) pouvait passer à l'acte", a renchéri Élisabeth Borne dans La Tribune Dimanche.

Ce que l'on sait sur Mohammed M., l'auteur présumé de l'attentat

Avant ce funeste 13 octobre, cet ancien élève du lycée Gambetta-Carnot d'Arras n’avait pas de casier judiciaire. "La seule chose dont nous avions connaissance sur cette personne, c'est lorsqu'il s'en est pris à sa maman", a affirmé Gérald Darmanin sur TF1. "Il a connu une garde à vue pour violences intrafamiliales."

À l'issue d'une réunion de sécurité organisée ce lundi à l'Élysée, le ministre de l'Intérieur a précisé que la mère du suspect, cible de ces violences, avait refusé de porter plainte. En revanche, la préfecture du Pas-de-Calais s'était alors renseignée sur la possibilité d'expulser le jeune homme. "Le ministère avait répondu que ce n'était pas possible parce que les violences intrafamiliales, surtout lorsque les gens ne sont pas condamnés, ne rentrent pas dans le cadre de la loi actuelle (...)", a rappelé l'ancien maire de Tourcoing. 

Depuis son arrestation vendredi, Mohammed M. "ne s'est pas exprimé" face aux enquêteurs. Ses motivations "restent à définir", a relevé samedi Gérald Darmanin qui, la veille sur notre antenne, évoquait "sans doute" un lien avec les événements au Proche-Orient

Une famille bien connue de la police et de la justice

En 2014, la famille de Mohammed M. avait été visée par une procédure d'expulsion qui a finalement été annulée. L'assaillant présumé ne pouvait pas être expulsé légalement, étant entré en France avant l'âge de 13 ans, selon Gérald Darmanin. Seul son père Iakub M., lui aussi fiché S et "tenant d'un islam radical", a dû quitter le territoire national en 2018, a indiqué le ministre de l'Intérieur. 

L’un des frères de l'assaillant, Mosvar M., âgé de 21 ans, a quant à lui été condamné en avril 2023 à cinq ans de prison pour "association de malfaiteurs terroriste" après un projet d'attentat déjoué qui visait des policiers devant l'Élysée en 2019. "C’est sur un signalement du ministère de l’Intérieur qu’il a été emprisonné pour apologie du terrorisme", a souligné Gérald Darmanin confirmant que les autorités surveillaient la famille. En juin 2023, Mosvar M. a été condamné à 18 mois de prison supplémentaires pour "apologie du terrorisme" après ses partages sur les réseaux sociaux de contenus violents, notamment de la propagande djihadiste du groupe terroriste État islamique.

"Cet élève et même la fratrie avaient fait l’objet depuis plusieurs années de signalements de la part des enseignants" du lycée Gambetta d'Arras, a déclaré Gabriel Attal dimanche sur TF1. "Ils avaient fait plusieurs signalements pour le grand frère dès 2016 (...) S’agissant du terroriste, il avait fait l’objet de signalements en 2021 et 2022, qui étaient remontés à la direction de l’établissement, aux services de l’Éducation nationale, et transmis au ministère de l’Intérieur. C'est ce qui a probablement entraîné la mise sous surveillance de cet individu", en a déduit le ministre de l'Éducation nationale. 

Le profil inquiétant de Maxime C., soupçonné d'être en lien avec l'auteur de l'attentat

À 21 heures ce lundi, plusieurs personnes sont toujours en garde à vue, interrogées par les enquêteurs de la Sous-direction antiterroriste de la police judiciaire (Sdat) et de la DGSI dans le cadre de l'enquête ouverte par le Parquet national antiterroriste (Pnat). En revanche, un homme actuellement incarcéré et dont le rôle interroge les enquêteurs a vu sa garde à vue levée ce lundi soir. 

Maxime C., 32 ans, qui se fait appeler "Hamza Bilal", selon nos informations, a été condamné dans plusieurs affaires, dont une où il a écopé de 10 ans de prison pour "association de malfaiteur terroriste" en raison d’un acte de terrorisme en préparation. D’après une source syndicale, il avait notamment pour cible du personnel pénitentiaire. Selon nos informations, c'est Movsar M., son frère aîné, qui a mis Mohammed M. en relation avec Maxime C..

L'une de nos sources indique que ce dernier s'est converti à l'islam et qu'il se serait radicalisé en prison, où il a effectué plusieurs séjours en quelques années. Aujourd'hui détenu à l'isolement à la prison de Moulins-Yzeure (Allier), où il a été transféré le 28 septembre, Maxime C. présente un "profil vraiment inquiétant", selon une source proche du dossier à l'AFP, en raison de son "influence auprès des codétenus".

Deux Biélorusses, qui avaient été placés en garde à vue dans les premières heures de l'enquête, ont quant à eux été relâchés car "ils n'avaient rien à voir avec l'enquête"


Aurélie SARROT avec le service Police-Justice

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