Violences urbaines : "deux claques et au lit", le conseil déjà polémique du préfet de l'Hérault

par M.L (avec AFP)
Publié le 3 juillet 2023 à 15h10

Source : Les MATINS LCI

Alors que des violences urbaines secouent le pays depuis près d'une semaine, le gouvernement a appelé les parents à la "responsabilité".
Le préfet de l'Hérault les a même enjoints à administrer "deux claques" à leur "gamin", si celui-ci "descend dans la rue" pour s'attaquer à des policiers, des pompiers ou des magasins.
Des propos accueillis par une pluie de critiques à gauche, qui accusent le préfet de promouvoir la violence contre les enfants.

La polémique n'a pas tardé à éclater. "La méthode, c'est deux claques et au lit !", a clamé ce lundi le préfet de l'Hérault Hugues Moutouh sur France Bleu, à l'adresse des parents de mineurs impliqués dans les violences urbaines qui secouent le pays depuis près d'une semaine. Au cours d'une interview, il les a enjoints à employer la méthode forte pour endiguer ces tensions apparues depuis la mort du jeune Nahel mardi dernier à Nanterre, tué par un policier, alors que le gouvernement appelle depuis plusieurs jours ces parents à la "responsabilité". Le préfet a explicitement remis en cause la loi interdisant les violences éducatives ordinaires, s'attirant par la même occasion les foudres d'élus de gauche.

Hugues Moutouh a d'abord déploré un "bilan très lourd" des violences dans son département, "avec de nombreuses dégradations des bâtiments publics, des commerces et boutiques privées, des locaux associatifs", et rappelé que sur les 48 personnes interpellées sur son territoire, nombre d'entre elles sont des mineurs.

Très franchement, de vous à moi, si demain, vous attrapez votre gamin qui descend dans la rue pour brûler des véhicules de police, ou caillasser des pompiers, ou piller des magasins, la méthode, c'est quoi ? Deux claques et au lit !
Hugues Moutouh, préfet de l'Hérault

"On ne découvre pas que l'on a des responsabilités par rapport à ces enfants lorsqu'ils sont adolescents. Quand on met au monde des enfants, on s'en occupe dès la naissance", a-t-il poursuivi sur France Bleu Hérault, une séquence reprise sur Twitter où elle a été visionnée plus de 750.000 fois. "Si effectivement, dans les 12-13 premières années, ces enfants sont élevés comme des herbes folles, il ne faut pas s'étonner qu'à 12-13 ans, on les voit caillasser des véhicules de police ou piller des magasins."

"Je sais qu'en 2019, le Parlement a interdit la fessée, mais très franchement, de vous à moi, si demain, vous attrapez votre gamin qui descend dans la rue pour brûler des véhicules de police, ou caillasser des pompiers, ou piller des magasins, la méthode, c'est quoi ? Deux claques et au lit !", s'est emporté le préfet. "C'est ce que faisaient nos grands-parents", a-t-il argué, estimant par ailleurs que la question n'était pas liée à "certains quartiers" et qu'il n'y avait "pas d'effet culturel" à ce sujet.

"La violence pour combattre la violence"

En France, la loi "anti-fessée" de 2019 a inscrit dans le Code civil que "l'autorité parentale s'exerce sans violences physiques ou psychologiques". Sur Twitter, le premier secrétaire du Parti socialiste (PS), Olivier Faure, s'est indigné qu'un "préfet prône la culture de la violence pour combattre la violence", tandis que le député Europe Écologie-Les Verts (EELV) Benjamin Lucas jugeait qu'un "préfet de la République ne devrait pas dire cela".

"Les enfants violents ont très souvent été les victimes de violences intra-familiales. C'est un fléau dans l'Hérault et en France. Est-ce une demande de plus de violences du préfet ?", s'est quant à lui irrité le député de l'Hérault La France insoumise (LFI) et instituteur Sébastien Rome. "Frapper son enfant est interdit (en plus d’être profondément stupide)", a abondé le député de Paris Aymeric Caron, également insoumis. "Ce haut fonctionnaire d’État, dont le rôle est de faire respecter la loi, encourage aux violences sur les enfants", a-t-il ajouté, estimant qu'il "doit être sanctionné" et appelant la Première ministre Elisabeth Borne à "une réaction". L'eurodéputé écologiste David Cormand a de son côté estimé que le préfet était "dans le déni sur les injustices sociales, territoriales ou familiales".

Ancien conseiller technique de Nicolas Sarkozy au ministère de l'Intérieur, Hugues Moutouh a, depuis son arrivée dans l'Hérault en juillet 2021, mené une politique de fermeté dans la lutte contre les bidonvilles, ce qui lui a valu la réputation de "préfet bulldozer". Il a aussi été critiqué par la gauche, notamment lorsqu'il avait accusé des manifestants contre la réforme des retraites d'"actes de vandalisme" en mars dernier. 

Depuis plusieurs jours, le gouvernement insiste sur le rôle que les parents des enfants impliqués dans les violences urbaines devraient selon lui jouer. Vendredi, Emmanuel Macron a souligné la "responsabilité des parents", un message martelé par le ministre de la Justice Eric Dupond-Moretti qui a insisté sur les sanctions encourues par ceux dont les enfants se retrouveraient devant la justice. 

"Ceux qui, en responsabilité, peuvent assurer l'autorité parentale et qui ne le font pas, par désinvolture ou par intérêt, ce qui est pire, il faut quand même leur rappeler un certain nombre de choses", a-t-il répété ce lundi matin sur France Inter. "Il faut se poser la question de la responsabilité des parents, ce n'est pas à la police nationale, aux maires ou à l'État de régler le problème", a abondé peu après le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, lors d'un déplacement à Reims.


M.L (avec AFP)

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