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Élection présidentielle : l'abstention, un mal typiquement français ?

Publié le 11 avril 2022 à 19h11, mis à jour le 11 avril 2022 à 19h29
Aller voter n'a rien d'un réflexe pour de nombreux Européens.
Aller voter n'a rien d'un réflexe pour de nombreux Européens. - Source : Illustration Arnaud Jaegers via Unsplash

Généralement plus basse que lors d'autres scrutins, l'abstention est restée élevée à l'occasion du premier tour de la présidentielle.
À chaque élection, des propositions émergent pour faire progresser la participation.
Des problématiques qui se posent aussi chez nos voisins européens, dans des proportions parfois bien supérieures.

Affinés au fil de la soirée électorale, les chiffres de l'abstention ont évolué jusqu'à atteindre les 26,31%. En pratique, plus d'un électeur sur quatre n'est donc pas allé voter dimanche, une proportion qui se rapproche de celle historique enregistrée en 2002 pour un premier tour. Les analystes, comme souvent, n'ont pas manqué d'évoquer une abstention qui serait le "premier parti de France", non sans un certain fatalisme. Une situation critique comparée à celle de nos voisins ? Pas forcément, surtout lorsque l'on se penche sur les démocraties de l'Est de l'Europe. 

Une vaste crise démocratique

Susciter l'engouement, encourager la participation... Un objectif pour tous les responsables politiques, mais qui se révèle aussi difficile en France que dans de multiples autres pays d'Europe. Si tous les états n'élisent pas un président ou une présidente, les chefs d'États au sein de l'UE ne sont pas toujours "bien élus", loin de là. 

Certes, des républiques parlementaires comme la Belgique affichent une faible abstention (10% lors des dernières législatives fédérales), mais il faut rappeler que le vote est obligatoire chez nos voisins. Mention "bien" aussi au Danemark, où le premier tour des législatives 2019 s'est soldé par une participation de presque 85%. Malgré un scrutin étalé sur trois jours et l'autorisation du vote par correspondance pour les plus de 70 ans, un électeur néerlandais sur cinq n'a pas voté l'an passé aux législatives. La faute en partie au Covid, même si lors du précédent scrutin la participation était d'à peine deux points supérieure.

Habituée aux crises politiques, l'Italie peine elle aussi à faire se déplacer les électeurs. Les législatives de 2018 s'étaient en effet soldées par une abstention de presque 28%. Un chiffre dont s'approchait celui des dernières élections allemandes (23%). C'est toutefois mieux qu'en Irlande, en Estonie, en Espagne ou au Portugal : dans ces pays, les élections permettant de nommer les principaux dirigeants ont affiché une participation respective de 63%, 64%, 66% et... 51%. Du côté de Lisbonne, le Premier ministre António Costa n'a ainsi recueilli qu'à peine plus de 20% des suffrages des inscrits. 

Ces signaux démocratiques inquiétants s'observent tout autant en Europe de l'Est, avec 51% de participation à la dernière présidentielle roumaine de 2019. La Bulgarie a fait encore pire l'an passé, avec un chef de l'État élu au terme d'un scrutin n'ayant rassemblé que 38% des inscrits... En théorie obligatoire en Grèce, le vote reste boudé par de nombreux citoyens, en témoigne une participation de 58% en 2019.

"Dans les grandes démocraties qui nous entourent, en Allemagne, en Espagne et au Royaume-Uni, les taux de participation sont en moyenne de 70 % sur les années 2010. C’est un peu moins qu’en France, où le scrutin présidentiel personnalise davantage le combat électoral et peut donc susciter une plus grande attention", confiait il y a peu au site Toute l'Europe le professeur à Sciences Po Olivier Rozenberg. "Le vrai écart" à ses yeux, s'observe "avec les démocraties d’Europe centrale et orientale, où la participation est beaucoup plus faible, entre 50 % et 30 % en Pologne ou en Roumanie par exemple. Dans ces pays, la désaffection vis-à-vis des élections est arrivée très tôt après la chute du mur." Il évoque ainsi une démocratie qui "a tourné un peu à vide, avec seulement un électeur mobilisé sur deux, voire moins".

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Thomas DESZPOT

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