L'Outre-mer, parent pauvre de la vaccination ?

Publié le 9 juillet 2021 à 16h49, mis à jour le 9 juillet 2021 à 23h20
En Guyane comme ailleurs en Outre-mer, la population est moins volontaire pour aller se faire vacciner.
En Guyane comme ailleurs en Outre-mer, la population est moins volontaire pour aller se faire vacciner. - Source : JODY AMIET / AFP

RETARD - Malgré un afflux régulier de doses, la population ultramarine demeure assez largement moins vaccinée que celle en métropole. La conséquence, notamment, d'une défiance encore assez forte dans ces départements et territoires.

On compte aujourd'hui en Outre-mer plus de 2 millions d'habitants, répartis à travers les différents départements et régions. Une population qui n'a pas été épargnée par le Covid-19, et qui est donc logiquement concernée par la campagne de vaccination lancée en janvier. 

Pour autant, les chiffres officiels laissent transparaître un retard notable par rapport à la métropole. Les doses manquent-elles en Guadeloupe, à la Réunion ou en Guyane ? Non, assurent les autorités, qui mettent avant tout en avant une défiance des habitants.

Moitié moins vaccinés

Pour consulter au jour le jour l'avancée de la vaccination en France, rien de mieux que la plateforme Geodes, alimentée par les données de Santé Publique France (SPF). Un rapide coup d'œil permet de constater que dans la très grande majorité des régions métropolitaines, le cap des 50% d'habitants vaccinés avec une dose au moins est dépassé. Lorsque ce n'est pas le cas, comme en Corse, cette barre est sur le point d'être franchie. En revanche, il n'est en rien en Outre-mer. À l'exception de Saint-Barthélemy, tous les départements et régions ultramarins affichent des taux moins importants. Moins de 30% de premières doses à la Réunion, à peine 16% en Martinique et Guadeloupe (si l'infographie qui suit ne s'affiche pas, cliquez ici). 

Si SPF ne communique pas sur l'ensemble des collectivités d'Outre-mer, les chiffres disponibles font état d'un retard analogue du côté de la Polynésie française ou de Wallis-et-Futuna. La conséquence d'un retard initial, jamais comblé depuis ? "Il y a eu un petit décalage par rapport à la métropole, ce, pour une raison assez simple : pour aller jusque dans les Outre-Mer, il a fallu organiser de transports qui étaient très souvent militaires", confiait le ministère de la Santé en mai. Pour autant, celui des Outre-mer, sollicité par LCI, estime aujourd'hui que cela n'a pas eu d'impact significatif. Les doses, nous explique-t-on, sont aujourd'hui largement disponibles, livrées chaque semaine. 

Dans leur grande majorité, les doses injectées sont issues des stocks Pfizer et Moderna, indique le ministère, ces derniers étant ceux pour lesquels la défiance des habitants est la moindre. Dans certains territoires isolés, le vaccin Janssen est parfois privilégié, dans le cadre de stratégies dites "d'aller vers". Il s'agit de se rapprocher de populations à l'écart des systèmes de soins, ou géographiquement isolés, l'atout du Janssen résidant dans sa dose unique. Reste désormais à convaincre les sceptiques, encore très nombreux.

Convaincre, le grand défi

Plusieurs éléments peuvent expliquer les retards observés en Outre-mer. Parfois, des responsables politiques affichent une forme de défiance face au vaccin, comme ce fut le cas en Guyane avec la sénatrice Marie-Laure Phinéra-Horth. Une vidéo dans laquelle elle indiquait ne pas vouloir d'injection a été largement relayée sur les réseaux sociaux. Un choix personnel, a-t-elle argué, faisant écho à celui de nombreux citoyens ultramarins.

Dans les Antilles, une plante endémique surnommée "herbe à pic" a été présentée comme un potentiel moyen de lutter contre le virus. Si son efficacité n'a pas été démontrée scientifiquement, elle symbolise l'attachement d'une partie des habitants à la médecine traditionnelle, qui détourne parfois des vaccins et des prises en charge plus conventionnelles, via les professionnels de santé. Un "frein culturel", glisse le ministère, qui appelle toutefois les citoyens à prendre leurs responsabilités.

Alors que les ARS et les préfectures se mobilisent pour tenter de convaincre, la mission reste délicate. Il s'agit en effet aussi de lutter contre la prolifération de fake news, très relayées notamment en Guyane. Une région où les initiatives pour promouvoir le vaccin n'ont pas toujours l'effet escompté. Alors qu'un supermarché proposait en avril des bons d'achat aux personnes vaccinées, l'opération a été stoppée deux jours à peine plus tard, en raison des multiples critiques que cette initiative a générées. 

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Thomas DESZPOT

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