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Chômage : plus de la moitié des demandeurs d'emplois ne touchent-ils vraiment aucune indemnité ?

Publié le 21 mars 2024 à 17h38, mis à jour le 21 mars 2024 à 17h52

Source : TF1 Info

Plusieurs responsables syndicaux s'opposent à une nouvelle réforme budgétaire de l’assurance-chômage.
Ils dénoncent une "stigmatisation populiste des chômeurs" et affirment que seuls 36% d'entre eux sont indemnisés.
Après quelques calculs réalisés sur la base de données publiques, TF1info aboutit à des chiffres assez similaires.

"Alors que la négociation assurance-chômage s’est terminée depuis moins de trois mois, le gouvernement a déjà annoncé une nouvelle réforme pour en durcir les effets. Ce serait la cinquième depuis 2017, soit quasiment une tous les ans". Dans une tribune publiée le 18 mars dernier dans Le Monde, plusieurs responsables syndicaux interpellent l'exécutif. Sophie Binet, côté CGT, s'associe aux représentants de la CFTC, de CFE-CGC, de la CFDT et de FO pour demander au gouvernement de revoir sa copie. 

Opposés à un texte vu comme une "stigmatisation populiste des chômeurs", les signataires souhaitent voir le gouvernement "renouer avec le pacte social". Plusieurs chiffres sont mis en avant pour décrire la réalité des demandeurs d'emploi : le texte explique par exemple que "seuls 36% des inscrits à France Travail (anciennement Pôle emploi) sont indemnisés". Le corollaire ? 64% des inscrits ne toucheraient pas le moindre euro chaque mois.

Des statistiques officielles confirment ce constat

Pour connaître le nombre de demandeurs d'emploi indemnisés, c'est sur le site de France Travail qu'il faut se rendre. Selon les derniers chiffres, relatifs au 4ᵉ trimestre 2023, cela représente un total de 2.375.900 personnes. Cette information en poche, il nous faut la comparer au nombre de personnes qui sont inscrites à France Travail, au sein des catégories A, B, C, D et E. 

Cette fois, direction les publications de la Dares, l'organe statistique du ministère du Travail. Pour effectuer une comparaison objective, il convient de se baser également sur les chiffres du 4ᵉ trimestre 2023 : ils nous apprennent que 6.169.500 Français sont comptabilisés. Un bref calcul permet d'aboutir à une indemnisation qui concerne 38,5% des inscrits à France Travail. Soit 2,5 points de plus qu'indiqué dans la tribune, signifiant que 61,5% d'entre eux qui ne touchent rien chaque mois. 

Notez que dans ces calculs, TF1info n'a comptabilisé parmi les demandeurs d'emploi indemnisés que les individus qui le sont par l'Unedic, hors formation. "Il est de coutume" de réaliser ce choix méthodologique, assurait en 2022  Bruno Coquet. Auprès des Vérificateurs, le docteur en économie et membre de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) expliquait alors que l'objectif est avant tout de comptabiliser des personnes "pas disponibles ni susceptibles d’être indolentes dans leur recherche d’emploi puisqu’en train de suivre une formation agréée par Pôle emploi".

Une proportion d'indemnisés supérieure si l'on exclut les catégories D et E

Pour nuancer le tableau dressé par les organisations syndicales signataires de la tribune, il faut noter que seuls les demandeurs d'emploi des catégories A, B et C sont tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi. Les catégories D et E rassemblent, elles, les "sans emploi, [...] pas immédiatement disponible, [...] et pas tenues d'accomplir des actes positifs de recherche d'emploi", ainsi que celles "pourvues d'un emploi", pas non plus tenues "d'accomplir des actes positifs de recherche d'emploi". 

Si l'on rapporte le nombre de Français indemnisés aux seuls inscrits dans les catégories A, B et C (dans une démarche de recherche active), on aboutit logiquement à un pourcentage supérieur de personnes prises en charge par l'Unedic. On constate ainsi que 43,9% des demandeurs d'emploi sont indemnisés.

Pour comprendre le fait que plus d'une personne sans emploi sur deux ne soit pas indemnisée par l'Unedic, France Travail fournit quelques éléments d'explication. L'institution évoque, par exemple, la situation des "demandeurs d’emploi indemnisables, mais non indemnisés temporairement", en raison par exemple d'un "différé d’indemnisation, comme un délai de carence en cas de rupture conventionnelle". Sont aussi concernées les personnes en "arrêt maladie ou grossesse", de cas de figure pour lesquels "le relais de l’indemnisation est pris par l’assurance maladie".  

France Travail note par ailleurs qu'une partie des demandeurs d’emploi se révèlent "non indemnisables et donc non indemnisés". Des individus qui n'ont "pas de droit à l’allocation chômage, parce qu’ils ne remplissent pas les conditions (durée minimale d’affiliation)", ou bien encore parce qu'ils "ont dépassé leur fin de droits sans remplir les conditions pour rouvrir un droit".  

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Thomas DESZPOT

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