"En un dixième de seconde, tout peut basculer" : le quotidien hors norme des vétérinaires de la faune sauvage

par Hamza HIZZIR | Reportage : François Cardon
Publié le 4 mai 2024 à 17h52

Source : TF1 Info

En France, ils ne sont qu’une centaine à exercer le métier de vétérinaires pour animaux sauvages.
Ces soignants ont le privilège, et la responsabilité, d’approcher les espèces les plus rares et les plus dangereuses.
TF1 en a suivi quatre pendant plusieurs mois, à travers la France et jusqu’au Costa Rica.

Ils ont la tâche la plus compliquée et la plus enviée de toute leur profession. Ce sont les vétérinaires spécialisés "faune sauvage". On n’en compte qu’une petite centaine en France, parce que leurs compétences sont rares. Donc précieuses. Elles leur permettent de soigner des félins, des reptiles, des mammifères marins ou les plus grands herbivores de la savane africaine. D’approcher, partout en France et dans le monde, les espèces les plus rares et parfois les plus dangereuses. Dans le cadre du magazine "Reportages découverte" diffusé ce samedi 4 mai, à voir dans la vidéo en tête de cet article, TF1 a suivi quatre d’entre eux au quotidien durant plusieurs mois. L’occasion de se plonger dans le détail de ce métier d’exception.

"Chaque fois qu’on ouvre un enclos, c’est une aventure"

À 26 ans, Johanne Ferri Pisani est, selon ses propres termes, un "bébé véto". Mais elle est déjà responsable de la santé des 300 animaux sauvages des Terres de Nataé, un parc animalier de préservation des espèces les plus menacées, situé à Pont-Scorff, au cœur de la Bretagne. On la voit accueillir très solennellement, et précautionneusement, une famille de panthères dans un zoo encore en travaux, établir peu à peu un lien de confiance avec des éléphants, "une espèce extrêmement sensible", pour les piquer ensuite derrière l’oreille, ou encore poursuivre un ouistiti récalcitrant dans sa cage… "Le meilleur retour qu’on puisse avoir sur notre travail, clame-t-elle, c’est de voir les animaux épanouis."

Romain Potier, lui, parcourt l’Hexagone en tant que vétérinaire itinérant. C’est lui qu’on appelle pour les opérations les plus délicates : l’anesthésie périlleuse d’une girafe traumatisée (car écrasée par sa mère pendant l’enfance) pour limer ses sabots à la meuleuse en moins de trente minutes chrono ; l’opération de la rage de dents d’un phoque très âgé que dix personnes doivent ventiler en permanence  tout du long (parce qu’il ne respire pas spontanément sous anesthésie) afin de lui éviter une hémorragie fatale dans les poumons ; la lente mise en place de la réconciliation d’un bébé rhinocéros avec sa mère l’ayant rejeté après un accouchement stressant… "Si on n’aimait pas ce métier, il serait trop exigeant", souffle-t-il

Clément Paillusseau, l’un des plus grands spécialistes français des reptiles, ne dit pas autre chose. Et pour cause : celui que l’on voit d'abord ausculter un cobra à mains nues dans sa clinique parisienne, sait soigner les serpents, mais pas les manipuler. On le suit donc ensuite durant une formation destinée à l’aider à y parvenir, à Royan, dans un parc unique en France, concentrant le plus grand nombre de reptiles venimeux dans le pays. La fin de son cursus le confrontera au mamba noir, l’un des serpents les plus rapides et dangereux au monde. "Chaque fois qu’on ouvre un enclos, c’est une aventure, confie Marc, son formateur. Une aventure maîtrisée, mais on n’oublie pas le danger. En un dixième de seconde, tout peut basculer, un accident n’est jamais exclu." À savoir, en l'occurrence, une morsure potentiellement mortelle, du moins très handicapante.

Enfin, il y a Norin Chai, qui se consacre désormais aux soins des animaux sauvages dans leur milieu naturel. Sa mission au Costa Rica montre, notamment, comment il mène une opération pour redonner la vue à un carcajou aveugle. "Je dois aller chercher le cristallin (une lentille transparente à l'intérieur de l'œil) sans léser les autres organes, c’est un méga challenge", commente-t-il, au milieu de cette intervention de deux heures. Sa récompense à lui : assister à la remise en liberté, une fois son travail terminé. "C’est très émouvant. Si je pouvais parler à l’animal, je lui dirais merci d’avoir croisé ma route, lâche-t-il, les larmes aux yeux, lors de ce moment privilégié. À cet endroit exactement, j’ai impression d’être à ma place en tant que vétérinaire. C’est un coin de paradis, une connexion avec la vie, ce qui nous entoure et ce qui fait de nous ce que nous sommes."


Hamza HIZZIR | Reportage : François Cardon

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