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La France est-elle vraiment "le pays des 1200 fromages" ?

Publié le 10 mai 2024 à 19h10, mis à jour le 10 mai 2024 à 19h44

Source : Bonjour !

Invité de TF1 ce vendredi, le député LFI Alexis Corbière a qualifié la France de "pays des 1200 fromages".
Un chiffre impressionnant qui tranche avec celui avancé il y a plusieurs décennies par le Général de Gaulle, qui évoquait 258 variétés.
Selon les professionnels des filières laitières, on en recense plus de 1000 en France mais il reste difficile de tous les "comté".

Amené à réagir aux mobilisations pro-palestiniennes en France, le député LFI Alexis Corbière a dit les soutenir et les saluer, ce vendredi 10 mai dans "Bonjour ! La Matinale TF1". Et pour justifier sa position, l'élu de Seine-Saint-Denis n'a pas hésité à invoquer certaines traditions. "La France, c'est le pays des 1200 fromages et des manifestations étudiantes", a-t-il lancé. 

Alexis Corbière n'est pas le premier responsable politique français à faire du fromage un sujet politique. "Comment voulez-vous gouverner un pays où il existe 258 variétés de fromages ?", aurait ainsi lancé le Général de Gaulle, selon une célèbre citation qui lui est attribuée.

Alors, 258 variétés ? 1200 ? Difficile de s'y retrouver entre ces estimations. D'autant qu'elles ne sont pas les seules : durant la Seconde Guerre mondiale, Winston Churchill s'était lui aussi emparé du sujet pour évoquer l'occupation de la France par l'Allemagne nazie, déclarant qu'un "pays capable de donner au monde 360 fromages" ne pouvait "pas mourir"

Une diversité incroyable

Pour y voir plus clair et trancher la question du nombre de fromages français, il faut se tourner vers le Centre national interprofessionnel de l'économie laitière (Cniel). Sur son site, celui-ci va dans le sens d'Alexis Corbière, puisqu'il fait état de l'existence de quelque 1200 fromages, parmi lesquels 46 bénéficient d'une AOP (Appellation d'origine protégée) et 9 d'une IGP (Indication géographique protégée). Ce chiffrage du Cniel donne un ordre d'idée, mais n'est pas exhaustif : il s'agit d'une estimation qui fut à l'origine relayée à l'occasion d'un colloque en 2002.

D'autres sources fournissent des chiffres encore plus élevés. À commencer par le magazine Profession fromager, qui édite ainsi un guide annuel où se côtoient environ 2400 fromages français. Un décompte d'autant plus impressionnant qu'il ne regroupe que des variétés au lait cru.

S'il est si complexe de s'accorder sur le nombre précis de fromages que compte le terroir de la France, cela s'explique en grande partie par la difficulté de caractériser un type de fromage. Faut-il par exemple considérer que le comté, qui figure parmi les fromages les plus appréciés des Français, ne doit être comptabilisé qu'une fois ? Certains gourmets pourraient y trouver à redire, tant la durée d'affinage (de 4 à 36 mois) influence la texture et le goût. 

De même, faut-il ou non inclure dans les calculs des spécialités fromagères telles que la cancoillotte ? Idem pour les créations originales de certains fromagers, qui leur sont propres et ne font pas historiquement partie du patrimoine culinaire et artisanal d'un territoire bien délimité.

Une affection incontestable

Bien que ces différents décomptes demeurent sujets à débat, certains chiffres sont, eux, incontestés. Ceux, notamment, qui placent les Français parmi les plus grands consommateurs de fromage. Les classements varient généralement en fonction des sources, mais s'accordent pour nous placer dans le top 5 mondial. 

Le résultat d'un héritage séculaire, que Charles III en personne mettait en avant en 1992 à l'occasion d'une visite dans l'Hexagone. Le prince de Galles devenu roi d'Angleterre s'opposait alors à des normes européennes qui, à ses yeux, mettaient en péril une part de notre terroir.

Un discours remarqué dans lequel le futur souverain s'interrogeait sur les risques d'un excès de règles : "Dans une société bactériologiquement correcte, que deviendront le brie de Meaux, le crottin de Chavignol ou le bleu d'Auvergne ? Dans un avenir libre de microbes et génétiquement programmé, quel espoir reste-t-il pour la fourme d'Ambert démodée, le gruyère de comté mal formé ou l'odorant pont-l'évêque ?"

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Thomas DESZPOT

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