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Flambée des prix : l’État s’est-il vraiment enrichi grâce à l’inflation ?

Publié le 27 septembre 2023 à 17h22, mis à jour le 2 octobre 2023 à 14h32

Source : JT 20h WE

Plusieurs responsables politiques mettent en cause le gouvernement, qui profiterait de l’inflation pour renflouer ses caisses.
Si l’État touche bien entendu plus de recettes liées à la TVA, il dépense aussi davantage pour endiguer la crise économique.

L’inflation, au cœur des préoccupations des Français, s’avère-t-elle être avantageuse pour le gouvernement ? Voilà les accusations formulées par plusieurs politiques de différents bords. "L'inflation est un impôt en plus, et il enrichit l'État", a dénoncé Xavier Bertrand le 26 septembre, sur le plateau de LCI. Selon le président des Hauts-de-France, le "surplus de TVA a représenté 15 milliards d'euros". 

Une semaine plus tôt, l’argument était déjà utilisé par le Rassemblement national (RN). Invitée de TF1, Marine Le Pen estimait que "plus il y a de l’inflation, plus l’État engrange de l’argent. Et cette situation-là est inadmissible. L’État ne peut pas s’enrichir en appauvrissant les contribuables". Que penser de cette démonstration, qui vise avant tout la TVA ?  

Un impôt perçu à 47% par l'État

D’abord, la TVA (taxe sur la valeur ajoutée) est un impôt "directement facturé aux clients sur les biens qu'ils consomment ou les services qu'ils utilisent". Elle est appliquée sur la plupart des biens et services. Seul son taux varie : normalement fixé à 20%, il est réduit à 5,5% sur les produits alimentaires ou de première nécessité. Il a exceptionnellement été ramené à 0% pour les vaccins et les tests contre le Covid. Il est donc logique, dans la mesure où les prix augmentent, que les recettes générées par la TVA gonflent aussi. 

Selon les chiffres de Bercy, 181 milliards d’euros de profits liés à cette taxe ont été perçus en 2021 et 200 milliards d’euros en 2022. 208,7 milliards d’euros ont été encaissés en 2023, d’après des données prévisionnelles transmises par le ministère de l’Économie sur les sept premiers mois de l’année. Sur ces recettes, l’État en perçoit 47%, tandis que 25% vont pour les collectivités territoriales et 28% pour le financement de la Sécurité sociale. 

20H : Les nouvelles taxes du budget 2024Source : TF1 Info

On le voit, ces profits augmentent plus vite que l’inflation. Par exemple, en 2022, les recettes ont bondi de 8% en un an, contre une hausse de l’inflation calculée à 5,2%. Pour Cyprien Batut, économiste passé à la Direction générale du Trésor, la raison est simple : "L’inflation est perçue sur tous les prix alors que la TVA s’applique aux biens à la consommation qui, eux, augmentent plus vite". 

Des dépenses exceptionnelles

Une fois passé ce constat, on pourrait donner raison aux détracteurs du gouvernement, qui estiment que l’inflation l’enrichit. C’est sans compter les dépenses liées à cette même inflation. Selon l’Insee, celles-ci ont progressé "de 61,2 milliards d'euros (+ 4,1%) et représentent 58,3% du PIB en 2022, après 59,1% en 2021 et 61,3% en 2020". Et comme le développe la Direction générale du Trésor, "certaines dépenses publiques sont, elles aussi, indexées sur les prix : retraites, allocations familiales, allocations logement, revenu minimum sont notamment indexés dans un délai inférieur à un an". Ainsi, "chaque point d’inflation en plus augmente automatiquement ces dépenses sociales de près de 5 Md€". 

"C’est un peu injuste de dire que l’augmentation des recettes liées à la TVA à cause de l’inflation sont des ressources en plus pour l’État, sans prendre en compte le reste", estime Cyprien Batut, qui pointe également l’aspect redistributif de l’impôt de la TVA. Par exemple, les profits générés par la TVA peuvent servir à financer des aides. Ces recettes ne sont pas affectées à des dépenses précises, précise le ministère de l’Économie, selon qui elles vont directement dans le budget de l’État. 

D’autres dépenses, causées par des mesures exceptionnelles pour soutenir les plus précaires, sont également décidées en temps de crise. Et peuvent creuser le déficit budgétaire. À ce sujet, le Trésor évoque "l’indemnité inflation, le renforcement exceptionnel du chèque énergie, les boucliers tarifaires sur le gaz et l’électricité, les aides accordées aux entreprises les plus exposées". En supprimant certaines de ces mesures, le gouvernement peut donc faire des économies. La fin progressive du bouclier énergétique rendrait ainsi 10 milliards d’euros à l’État, d'après Bruno Le Maire.

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Caroline QUEVRAIN

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