ENQUÊTE - JO de Paris 2024 : combien ça va coûter... et rapporter à la France ?

par M.L | Reportage TF1 Olivier Santicchi, Simon Humblot et Arnaud Ifergane
Publié le 24 juillet 2023 à 13h48, mis à jour le 26 juillet 2023 à 11h47

Source : JT 20h WE

Dans un an jour pour jour aura lieu le coup d'envoi des Jeux Olympiques, avec une cérémonie d’ouverture prévue le 26 juillet 2024.
Comme les précédentes éditions, l'événement bénéficie d’un budget colossal.
Des investissements qui seront probablement amortis entre les recettes de la billetterie et les retombées économiques plus globales, mais le tableau général reste encore incertain.

Pour parvenir à organiser des Jeux Olympiques français dès l'été prochain, il faudra mettre des moyens conséquents sur la table au total : une enveloppe de 8,2 milliards d'euros sera nécessaire. C'est le chiffre annoncé par le comité d'organisation des Jeux olympiques et paralympiques (COJOP) de Paris 2024. Quant aux recettes d’organisation, celui-ci additionne déjà le financement par le Comité international olympique (CIO), issu notamment des droits de télé, les produits dérivés et les partenariats, et la billetterie. Le tout devrait permettre de dégager 4,4 milliards d’euros. 

L’organisateur assure ainsi que si le tarif des places s’est envolé pour une petite partie des billets, suscitant une pluie de critiques, c’est justement pour réussir à amortir le coût global de l'organisation des compétitions. "On a une grille tarifaire extrêmement large, extrêmement accessible, avec des billets extraordinaires : 5% des places à plus de 400 euros, 10% à plus de 200 euros", décrit Michaël Aloïsio, directeur général délégué du COJOP, dans le reportage du 20H de TF1 en tête d'article. "C'est ce modèle économique qui nous permet d'équilibrer le budget des jeux", insiste-t-il. Mais ce n'est pas le seul levier sur lequel le Comité compte pour équilibrer ses dépenses.

Le pari du tourisme

Autre source potentielle de recettes : l'afflux de touristes lié à l'évènement, qui pourrait rapporter 2,8 milliards, selon les dernières projections disponibles, celles du Centre de droit et d'économie du sport (CDES), qui remontent à 2017. Les rentrées d'argent grimperaient donc à 7,2 milliards d'euros, approchant les 8,2 milliards déboursés.

Dans un hôtel quatre étoiles parisien, "Le Petit Oberkampf" dans le XIe arrondissement, le directeur a déjà perçu l'emballement de la demande et augmenté fortement ses prix, en conséquence : "entre 25 et 30% par rapport au tarif d'aujourd'hui", explique Sooruth Sookun. Malgré cette hausse, "nous avons enregistré des réservations assez rapidement", souligne-t-il. Un an avant les Jeux, la moitié des chambres est déjà louée, une situation inédite pour l'établissement. 

Une précieuse vitrine et des embauches à la clef

Quant à l'essor de l'économie française en général, qui devrait tirer profit de cet évènement de portée mondiale, il est encore trop tôt pour le chiffrer. Mais du côté de Marseille, dans les Bouches-du-Rhône, la ville est sûre d’en profiter. L’arrivée de la flamme olympique, les dix matchs de football et les compétitions de voile promettent à la cité phocéenne une vitrine mondiale auprès de centaines de millions de personnes, grâce à la télévision. 

Cela nous a ouvert de nouveaux marchés, de nouvelles portes
Natacha Cappelier, directrice du cabinet de recrutement marseillais HumainEA

Et certains gains se mesurent déjà. Au sud de la ville, le cabinet de recrutement HumainEA a décroché la gestion administrative des 200 alternants du Comité d'organisation, un vrai changement de dimension pour la petite entreprise de sept personnes. "Cela nous a ouvert de nouveaux marchés, de nouvelles portes", se réjouit Natacha Cappelier, la co-fondatrice et directrice de la société. "On a signé avec des établissements publics, avec des entreprises privées... Et nous avons recruté deux personnes." Selon la Chambre de Commerce et d'Industrie, ce sont au total 150 000 emplois qui sont mobilisés pour la préparation et l'organisation des JO. 

Enfin, il faut aussi prendre en compte les ouvrages construits ou rénovés sur l’ensemble des sites : logements des athlètes et piscines serviront ensuite à la population. Cet investissement pourrait porter des ressources de Paris 2024 à 8,5 milliards d'euros, soit 300 millions d'euros de plus que les dépenses, de quoi faire pencher la balance du côté des recettes. 

Si l'ensemble de ces retombées économiques au global sont encore difficiles à évaluer, certaines projections se montrent déjà très optimistes : entre le tourisme, l'organisation et les constructions, ces recettes devraient être comprises entre 5,3 et 10,7 milliards d'euros pour la seule région Île-de-France, selon un rapport d'une mission d'information de l'Assemblée nationale présenté début juillet, qui s'inspirait des travaux du CDES. 

Le risque du dérapage des coûts

À condition toutefois que le budget initial n'augmente pas de façon inconsidérée. Un risque majeur, puisque la dérive des coûts est systématique lors des Olympiades. "En moyenne, le taux de dépassement du coût depuis les JO de 1968 est de 167 %", notait ainsi dans une étude de 2016 Wladimir Andreff, professeur émérite à l'université Paris 1 Panthéon Sorbonne et spécialiste de l'économie du sport.

Le budget total du COJOP a déjà été réévalué à plusieurs reprises, notamment à cause de l'inflation, avec une hausse marquée de 10% fin 2022. Mais la ministre des Sports et des JO, Amélie Oudéa-Castéra, avait alors réfuté tout dérapage budgétaire, en comparant la situation à celle des Jeux de Londres en 2012, lors desquels avaient été enregistrés "plus 16% de hausse des coûts", et ce "sans l'inflation", avait-elle assuré. Le budget prévisionnel avait été fixé à 4,8 milliards pour la capitale britannique, et le coût final s'était élevé à 11 milliards, selon Le Monde

De son côté, la Cour des comptes avait estimé dans un rapport publié en juin dernier que le budget de l'organisation des Jeux 2024 avait été "sous-estimé" au départ, et avait fustigé "une méconnaissance peu compréhensible de la complexité du cahier des charges du CIO". Si bien que selon elle, des "efforts d'optimisation" seraient sans doute à réaliser d'ici le début de l'évènement pour que ce budget reste dans les clous fixés. Son premier président Pierre Moscovici a assuré la semaine passée qu'il serait "extrêmement attentif" au coût de l'organisation des compétitions, dans un entretien au Parisien


M.L | Reportage TF1 Olivier Santicchi, Simon Humblot et Arnaud Ifergane

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