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Vladimir Poutine a-t-il annoncé qu'il "s'attaquerait à la Pologne et aux pays baltes" après l'Ukraine ?

Publié le 23 janvier 2024 à 20h16, mis à jour le 25 janvier 2024 à 14h58

Source : TF1 Info

Vladimir Poutine aurait "déjà annoncé qu'il s'attaquerait aux Pays Baltes, à la Pologne et à la Roumanie".
Les défenseurs de la Russie rétorquent qu'il s'agit d'un "délire".
Nous avons cherché à en savoir plus sur la position du chef du Kremlin.

L'Europe en a pris conscience en février 2022 : la guerre est à ses portes. Se rapprochera-t-elle encore davantage ? Selon l'ancien officier Guillaume Ancel, la Russie ne s'arrêterait pas là en cas de victoire en Ukraine. "Vladimir Poutine a déjà annoncé que s'il gagnait en Ukraine, il s'attaquerait aux pays baltes, à l'est de la Pologne et à la Roumanie", a ainsi argué ce spécialiste de l'analyse des stratégies et du rôle des communications dans les conflits armés. Une affirmation qui fait sursauter les soutiens de Moscou en France, qui s'étonnent de ces propos "délirants". Alors, ce discours a-t-il réellement été "inventé" ?

Des menaces distillées

Nous n'avons pas retrouvé de traces récentes de tels propos. Nos recherches montrent que la seule information de cet ordre provenant du chef du Kremlin remonte à 2014. À l'époque, le quotidien allemand Süddeutsche Zeitung révèle que Vladimir Poutine aurait menacé l'ancien président ukrainien, Petro Porochenko, d'envoyer ses troupes en Ukraine et dans plusieurs pays voisins. "Si je le veux, en deux jours, j'ai des troupes russes non seulement à Kiev, mais aussi à Riga, Vilnius, Tallinn, Varsovie et Bucarest", aurait déclaré le président russe à son homologue ukrainien. Cinq pays à la fois membres de l'Union européenne et de l'Otan. Des intentions qui n'ont jamais été confirmées par Vladimir Poutine et sur lesquelles Bruxelles a toujours refusé de s'exprimer.

Il ne s'agit donc pas d'une "annonce" à proprement parler. Toutefois, les observations de Guillaume Ancel ne peuvent pas non plus être décrites comme "délirantes", loin de là. Régulièrement, le chef du Kremlin ou ses plus proches conseillers expriment des menaces à peine voilées envers les pays baltes et la Pologne. Dernier exemple en date, le 16 janvier. Tandis que plusieurs centaines de citoyens russes présents en Lettonie sont menacés d'expulsion après avoir échoué à renouveler leur permis de séjour, Vladimir Poutine s'est insurgé que la Lettonie et d'autres États baltes "expulsent le peuple russe" de leur pays. Une situation qui "affecte directement la sécurité" de la Russie, a-t-il insisté selon ses propos cités par Ria Novosti. Or, comme le relève l'Institut pour l'étude de la guerre (ISW) dans une analyse à ce sujet, Vladimir Poutine a toujours utilisé "une définition extensive de la souveraineté de la Russie" dans ses actions, même en dehors de ses frontières. À ses yeux, son armée a le droit de protéger ses "compatriotes à l'étranger".

Si le chef du Kremlin modère relativement ses propos, ses plus proches conseillers ne font pas preuve d'une telle nuance. À l'instar d'Oleg Morozov, un député russe passé par le cabinet de Vladimir Poutine de 2012 à 2015. En mai 2022, l'élu écrivait dans la presse et sur son compte Telegram que la Pologne "devrait être la prochaine à être envahie et dénazifiée" par la Russie. L'ancien président russe, Dmitri Medvedev, avertissait quant à lui que ce pays membre de l'Otan était désormais considéré comme un "ennemi dangereux". "Quelle que soit l'ambition des plans revanchards, leur effondrement pourrait conduire à la mort de l'État polonais dans son intégralité", écrivait en novembre dernier le vice-président du Conseil de sécurité russe. Enfin, c'est sur le plateau de Rossiya 1, la chaîne de télévision publique russe, que les experts, élus et relais du pouvoir russe distillent cette idée à longueur de journée, prédisant par exemple l'absorption par la Russie des pays voisins dans "un grand foyer russe".

Les pays concernés se préparent

Un discours répété et entendu. Si bien que plusieurs pays se préparent à cette éventualité. Le ministre lituanien des Affaires étrangères, Gabrielius Landsbergis, a averti la semaine dernière que l'armée russe pourrait tenter d'avancer plus loin sur le continent européen. Dans la même semaine, le ministre de la Défense polonais, Władysław Kosiniak-Kamysz, a dit se tenir "prêt à faire face à n'importe quel scénario". Ces derniers mois, cette inquiétude s'est même emparée de pays bien plus à l'ouest. Le chef de l'armée belge, Michel Hofman, a prévenu mi-décembre qu'une victoire pousserait Vladimir Poutine à attaquer les pays baltes et la Moldavie. Le ministre allemand de la Défense, Boris Pistorius, a quant à lui estimé ce 19 janvier que "compte tenu des menaces quasi-quotidiennes du Kremlin", Moscou était susceptible de frapper un pays membre de l'Otan dans "les cinq à huit prochaines années". 

Des craintes officiellement balayées d'un revers de la main par le Kremlin. Face à cette rhétorique, le porte-parole de la présidence russe, Dmitri Peskov, assurait le 17 décembre dernier que Moscou n'avait "aucun intérêt - que ce soit en termes géopolitique, économique ou militaire - à combattre des pays de l'Otan". Tout en réitérant une vision du monde dans laquelle l'Otan serait démantelée.

Si, à l'heure actuelle, aucune déclaration de Vladimir Poutine ne va dans ce sens, le discours des plus proches représentants du pouvoir russe laisse bien penser qu'en cas de défaite de l'Ukraine, les ambitions russes n'en seraient que renforcées. Comme le résume l'Institut pour l'étude de la guerre, Vladimir Poutine est peut-être en train de mettre en place "les conditions pour de futures actions agressives de la Russie à l'étranger". 

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Felicia SIDERIS

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