Covid-19 : pourquoi la campagne de vaccination des enfants ne décolle pas

Publié le 26 janvier 2022 à 16h55, mis à jour le 27 janvier 2022 à 10h47

Source : TF1 Info

Un mois après son ouverture, la campagne de vaccination des enfants patine.
Face à la réticence des parents, les scientifiques sont partagés sur le bénéfice d'une campagne de vaccination massive.
Le retard est également provoqué par un manque d'accessibilité des créneaux de vaccination.

Faire progresser la vaccination des enfants. Après les annonces de Jean Castex jeudi dernier, c'est au tour des Académies de Science et de médecine d'appeler à une accélération de la campagne pour les 5-11 ans. Car si l'ouverture a été faite il y a un mois, le public visé n'est pas encore au rendez-vous. Sur quelque cinq millions d'enfants concernés, à peine plus de 200.000 ont reçu une première dose contre le Covid. Cela représente une vaccination partielle de près de 4% alors même que la vaccination des adolescents a été, elle, beaucoup plus rapide cet été. En un mois, près de 24% de cette population avait reçu une première dose.

Une vaccination qui progresse aussi plus lentement que d'autres pays voisins de la France. Ainsi, en Italie, le taux était de 28,85% mardi, tandis qu'il était de 16% en Allemagne. En Espagne, plus de la moitié des 5-11 ans sont vaccinés, alors même que l'ouverture à la vaccination s'est faite le 7 décembre, soit un peu plus de deux semaines avant la France.

Dans ce pays, le taux de vaccination monte même à 80% dans certaines régions, comme en Gallice, qui a fait le choix d'organiser la vaccination directement dans les écoles. Or c'est justement la solution à laquelle appelle les Académies de sciences et de médecine, dans un communiqué de presse, recommandant de "hâter la vaccination des enfants âgés de 5 à 11 ans", avec des campagnes de vaccination dans les milieux scolaires.

Un manque de centres et des parents inquiets

Mais, malgré un bénéfice/risque "favorable" pour les enfants, la campagne est lente pour plusieurs raisons complémentaires. Le nombre de centres de vaccination permettant d'administrer des doses pédiatriques, spécifiques pour cette tranche d'âge, reste d'abord peu important. Selon des chiffres de la Direction générale de la Santé, 640 centres proposent la vaccination pour les 5-11 ans, alors même qu'il en existe 1565 pour le reste de la population

Le ministère de la Santé avait par ailleurs précisé qu'à terme, l'objectif était que tous les centres pour adultes puissent proposer des vaccinations pour les enfants. Ce n'est cependant pas encore le cas. "Tous ces signaux renforcent les réticences. Si le gouvernement ne se mobilise pas pour rendre la vaccination accessible, ça voudrait dire que ce n'est pas si nécessaire que ça", souligne la virologue Christine Rouzioux. Pour ouvrir l'accès, le Premier ministre a annoncé qu'en plus des médecins, les infirmiers, les pharmaciens et les sages-femmes pourront désormais vacciner les enfants contre le Covid. Une annonce qui a eu pour conséquence la commande de 85,5 mille doses pédiatriques cette semaine, soit une augmentation de 119% par rapport à la semaine précédente, promettant peut-être un élargissement de la campagne. 

Ces praticiens de proximité pourront également rassurer les parents, réticents pour la plupart à la vaccination de leurs enfants. En effet, d’après la dernière enquête de Santé publique France, parue le 16 décembre, seuls 43 % des adultes ayant des enfants âgés de 5 à 11 ans avaient l’intention de les faire vacciner. Une méfiance qui n'a pas été assez combattue pour Christine Rouzioux. "Je trouve qu'il n'y a pas eu beaucoup d'explication et de communication aux parents", regrette-t-elle.

Des arguments scientifiques mitigés

De plus, l'inquiétude première des parents se heurte à une communauté scientifique qui n'est pas unanime sur le fait de généraliser la vaccination anti-Covid à tous les enfants. Alors que les Académies des Sciences et de Médecine appelaient à ne plus hésiter sur la vaccination, la communauté pédiatrique se montre, elle, plus réservée. "La vaccination, c'est bien entendu la méthode de prévention la plus importante, mais elle doit avant tout s'adresser aux adultes et aux sujets fragiles", souligne ainsi le professeur Emmanuel Grimpel, pédiatre à l'hôpital Armand-Trousseau, à Paris. 

"Il y a plus de bénéfice à être vacciné que de bénéfice à ne pas l'être. Et le risque de ne pas être vacciné n'est pas faible", rappelle cependant Christine Rouzioux, membre de l'Académie nationale de Médecine. "Retarder la vaccination des enfants, ce n'est pas une bonne idée. On ne sait pas ce qui va se passer sur l'épidémie, on n'est qu'à un plateau, on n'est pas à un pic et on a un sous-variant qui arrive", alerte-t-elle.

Les experts sont néanmoins d'accord sur la nécessaire vaccination des enfants atteints de comorbidités. Or, sur plusieurs centaines de milliers d'enfants de moins de 11 ans dans ce cas, ils ne sont même pas 3% à être pleinement vaccinés. La vaccination anti-Covid leur avait été pourtant ouverte plusieurs semaines avant les autres enfants.


Aurélie LOEK

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