Députés et sénateurs s'accordent sur un texte destiné à faciliter l'accès au crédit

ML (avec AFP)
Publié le 3 février 2022 à 19h26

Source : TF1 Info

Une proposition de loi sur l'assurance emprunteur a été validée jeudi en commission mixte paritaire.
Le texte vise à élargir l'accès au crédit pour les anciens malades de cancer et d'hépatite C.
Il prévoit aussi la possibilité de changer de contrat sans frais à tout moment.

Des députés et sénateurs à l'unisson pour faire baisser les coûts et faciliter l'accès au crédit immobilier pour les assurés. Les deux chambres ont trouvé un compromis jeudi en commission mixte paritaire autour d'une proposition de loi. Le texte comporte plusieurs avancées, de la résiliation du contrat à tout moment à la suppression sous conditions du questionnaire de santé ou encore d'un délai du droit à l'oubli réduit. 

La proposition de loi doit encore être votée une dernière fois par les deux chambres, l'Assemblée nationale jeudi prochain et le Sénat le 17 février, avant d'être définitivement adopté. 

Portée par la députée Patricia Lemoine (Agir) et soutenue par le gouvernement, la proposition de loi "pour un accès plus juste, plus simple et plus transparent au marché de l'assurance emprunteur" vise à limiter les coûts pour les assurés en introduisant davantage de concurrence dans le secteur bancaire, en position de force dans ce domaine (88% de part de marché), et celui des assurances. Elle prévoit aussi d'ouvrir ces crédits à des candidats à l'emprunt jusqu'alors à la peine pour s'en procurer. 

"Cette proposition de loi représente une nouvelle perspective pour soutenir le pouvoir d'achat des Français, mais aussi une mesure de justice envers toutes les personnes souffrant de pathologies les empêchant de mener à bien leurs projets, faute de crédit immobilier", a réagi la majorité présidentielle dans un communiqué. 

La résiliation d'un contrat possible à tout moment

La possibilité de changer d'assurance emprunteur sans frais à tout moment, et non plus seulement à la date anniversaire, est la mesure phare du texte de compromis. Une décision pourtant retoquée en première lecture par le Sénat dominé par l'opposition de droite, avant d'être rétablie en CMP. Cette disposition entrera en vigueur le 1er juin prochain pour les nouveaux contrats, et à compter du 1er septembre pour les autres. 

Conformément à la volonté du Sénat, les obligations d'information des assurés sur leur droit à résiliation sont renforcées. Les assureurs devront ainsi les informer chaque année de l'existence de ce droit et de ses modalités de mise en œuvre, au risque d'être sanctionnés. "Nous considérions qu'élargir le droit à résiliation sans augmenter l'information des assurés était un coup d'épée dans l'eau (...) Nous pouvons désormais considérer que tous les éléments sont réunis pour que le marché de l'assurance emprunteur soit véritablement fluide", s'est félicité le rapporteur pour le Sénat Daniel Gremillet (LR).

Cette décision "favorisera une concurrence plus effective entre acteurs traditionnels et alternatifs, jouera à la baisse sur les tarifs" et "rendra du pouvoir d'achat aux Français, sans que cela coûte un seul centime", promettent de leur côté les députés LaREM dans un communiqué. 

Un accès à l'emprunt facilité pour les candidats ayant eu des pathologies

Autre volet de la proposition de la loi : des critères relatifs à la santé pour accéder au crédit immobilier ont été allégés, à l'initiative des sénateurs. Le questionnaire médical est ainsi supprimé pour les prêts immobiliers inférieurs à 200.000 euros et dont le terme intervient avant le 60e anniversaire de l'emprunteur. 

Quant aux anciens malades de cancer ou d'hépatite C, ils devaient attendre jusqu'ici dix années après la fin de leur protocole thérapeutique pour ne plus avoir l'obligation de déclarer leur maladie passée à leur assureur. Selon ce texte, ce délai du "droit à l'oubli" sera ramené de dix à cinq ans, quel que soit l'âge des candidats au crédit. L'objectif est de permettre aux assurés ayant souffert de pathologies d'obtenir plus facilement un emprunt immobilier notamment, "étape souvent cruciale pour la reconstruction personnelle des malades en rémission", fait valoir le groupe LaREM. Les problèmes de santé peuvent en effet dissuader les établissements de crédit, qui doutent des capacités de remboursement des consommateurs concernés.

L'avancée, qui ne figurait pas dans le texte voté en première lecture par les députés, a donné lieu à une petite bataille de communiqués. La majorité présidentielle s'est glorifiée de mettre "en œuvre l'engagement" d'Emmanuel Macron, tandis que le Sénat se vantait d'avoir, "contre l’avis initial du gouvernement, concrétisé la promesse de campagne du président de la République".

Les signataires de la convention Aeras (s'Assurer et Emprunter avec un Risque Aggravé de Santé) auront en outre l'obligation d'engager, d'ici au 31 juillet 2022, une négociation sur les pathologies autres que cancéreuses. Cette convention, lancée en 2019, se destine aux personnes présentant un "risque aggravé de santé", c'est-à-dire actuellement malades ou l'ayant été par le passé, et qui présentent donc un risque de pathologie, ou même de morbidité, lié à leur état de santé. Selon Le Monde, 12 % des 4,3 millions de demandes d’assurance pour des crédits immobiliers et professionnels instruites en 2019 présentaient ce risque. 

La convention Aeras propose notamment une grille de référence listant les pathologies permettant de bénéficier, sous certains critères, d'une assurance emprunteur dans des conditions standard et celles qui permettent tout de même d'un accès à certaines garanties et des surprimes plafonnées. Cette grille est régulièrement actualisée et inclut spécifiquement depuis mars 2021 les personnes atteintes du VIH

Le texte de loi validé par le CMP s'inscrit donc dans le sillage de ces mesures et marque, pour Sophie Primas, la présidente LR de la commission des Affaires économiques du Sénat, des avancées "historiques" qui "viennent mettre fin à un grand nombre de situations très injustes"

Un texte bien accueilli par le secteur

La validation de la proposition de loi a par ailleurs été saluée du côté des établissements bancaires. La Fédération bancaire française (FBF) a affirmé dans un communiqué son attachement "à l'accès au crédit immobilier sécurisé et à un modèle mutualisé d'assurance pour tous". Elle a appelé à "maintenir ces objectifs" avec le nouveau cadre.

Côté assureurs, Eric Maumy, président du courtier grossiste en assurances April et membre de l'Association pour la promotion de la concurrence en assurance des emprunteurs (Apcade) s'est félicité d'une décision qui va renforcer "le droit des emprunteurs". "La mise en concurrence des acteurs bancaires traditionnels, qui pratiquent des tarifs deux à trois fois plus chers, avec les assureurs externes, ne peut être que favorable au consommateur", a quant à lui déclaré Olivier Moustacakis, cofondateur d'Assurland.com.

"Ce sont 550 millions d'euros qui pourraient être redistribués aux Français dès la première année" à partir de la mise en place de cette résiliation à tout moment du contrat, abonde dans un communiqué Astrid Cousin, porte-parole du groupe Magnolia, courtier en assurance de prêt immobilier en ligne. D'après une étude réalisée par le site en partenariat avec BVA en janvier 2022, "66% des emprunteurs interrogés profiteraient de ce dispositif pour changer d'assurance de prêt"

Quant aux critères allégés pour accéder au crédit, si Maël Bernier, porte-parole de Meilleurtaux, a salué pour sa part l'extension du droit à l'oubli, elle a toutefois rappelé que la suppression du questionnaire de santé concernait les problèmes de santé actuels et non passés. Elle a donc appelé le secteur à être "vigilant" face à une potentielle augmentation des tarifs.


ML (avec AFP)

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