"Quelqu'un a acheté un immeuble à mon nom" : victime d'usurpation d'identité, elle affronte une dette de 500.000 euros

par La rédaction de TF1info | Reportage Wendy Zbinden - Mathilde Gautry - Manuel Laigre
Publié le 3 avril 2024 à 12h08, mis à jour le 3 avril 2024 à 12h15

Source : Grands reportages

Chaque année, 300.000 Français sont victimes d’usurpation d’identité, avec parfois des conséquences irréversibles.
C'est le drame que vit Virginie, dont la dette atteint 500.000 euros.
Elle a témoigné ce week-end dans le magazine de TF1 "Grands Reportages" sur l'enfer du vol d'identité.

Recroquevillée à l'arrière de sa voiture, sous un plaid, avec un coussin en guise d'oreiller. C'est ainsi que Virginie, réceptionniste dans un cabinet médical en Normandie, dort le plus souvent, après avoir dû renoncer bien malgré elle à son logement. Victime d'usurpation d'identité après le vol de sa carte d'identité dont elle avait bien déclaré la perte, la jeune femme a porté plainte il y a deux ans déjà. "Quelqu'un a acheté un immeuble à mon nom. Des gens se sont basés sur ma carte d'identité avec mon nom, mon prénom, adresse et date de naissance et à partir de là, ont fait des fausses fiches de paie, une fausse vie en fait tout simplement, qui est associée à mon nom. Ce qui veut dire que c'est que c'est à moi qu'on demande de rembourser tous les frais qui dépendent de cet immeuble", explique dans la vidéo en tête de cet article, replay du "Grand Reportage" "Vol d'identité : un enfer" diffusé ce week-end sur TF1, celle qui est pourtant embauchée en CDI. Comme les escrocs ne payent pas le prêt, c'est à cette dernière que la banque demande des comptes. Au total, elle doit faire face à une dette de 500.000 euros.

"Chaque matin, on plie, chaque soir, on déplie. Le but, c'est que si le midi avec mes collègues, on va manger quelque part, on ne voit pas mon lit. Le but, de se faire discret", poursuit-elle devant sa voiture, évoquant le sentiment de honte qui l'anime, même si elle n'y est pour rien.

"Je tombe des nues"

C'est au nord est de Paris, à Pantin, que des usurpateurs ont acheté au nom de Virginie, avec la complicité présumée d'un banquier et d'un notaire, un immeuble avant de louer les appartements à plusieurs familles. À l'époque de l'achat, en 2016, elle ne se doute de rien, jusqu'au courrier d'une banque qui lui demande le remboursement d'un prêt qu'elle interprète dans un premier temps comme une erreur. Mais quelques mois plus tard, à la réception d'une deuxième lettre de la mairie de Pantin, suite à un incendie dans l'immeuble, elle réalise qu'il n'en est rien. 

"Ce courrier m'a fait comprendre, je crois : usurpation, immeuble et des gens sous ma responsabilité", explique-t-elle, soulignant qu'elle est "tombée des nues" et précisant que c'est à ce moment que la "grande bataille" a commencé. En plus du prêt, la mairie lui demande de payer le relogement des locataires.

"On n'est pas juste un nom sur une carte d'identité"

Si cette somme colossale à rembourser aurait pu la faire sombrer, la jeune femme a toujours pu compter sur le soutien de ses proches, et notamment de sa sœur. "Au début, je voulais l'héberger à titre gratuit, mais elle m'a expliqué qu'elle ne pouvait pas par rapport aux huissiers", explique sa sœur Aurélie, très émue. Et pour cause : en logeant trop régulièrement chez elle, la justice pourrait considérer Virginie comme résidant chez cette dernière qui pourrait de fait se faire saisir du mobilier de façon solidaire. 

"Je ne pensais pas, avant que ça m'arrive, que ça pouvait impacter à ce point-là la vie de tous les jours", soupire Virginie. Et de poursuivre : "Je ne sais pas s'ils prennent conscience que derrière une usurpation il y a quelqu'un, on n'est pas juste un nom sur une carte d'identité, il y a une vie derrière, et cette vie-là, finalement, ils me la prennent". 

Un procès dans un an

Son seul espoir désormais pour sortir de la rue : faire condamner ses usurpateurs par un tribunal. La date du procès est fixée dans un peu plus d'un an, une étape qui lui permet, en attendant d'être libérée des milliers d'euros de dettes qui pèsent sur ses épaules, de geler ses dettes. 

Virginie attend avant tout de ce procès d'être reconnue en tant que victime. D'autant qu'en plus de renoncer à son logement, elle a dû faire de gros sacrifices et blessures personnels, à commencer par celle de n'avoir jamais été maman : à cause de sa situation précaire, elle a avorté. "C'est le chapitre difficile, je me dis que c'est vraiment pas juste, parce que j'ai essayé par le passé d'avoir un enfant et je suis tombée enceinte, et il a fallu que je fasse face à la réalité : vu que je n'ai pas d'avenir pour moi, j'en ai encore moins avec un enfant", confie la jeune femme qui rêve simplement désormais d'être propriétaire.

A titre de repère, chaque année en France, 300.000 personnes se font usurper leur identité.


La rédaction de TF1info | Reportage Wendy Zbinden - Mathilde Gautry - Manuel Laigre

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