1000 plaintes contre la pub "Vive la vulve" : la marque Nana peut-elle briser le tabou des règles ?

Publié le 11 octobre 2019 à 19h36

Source : Sujet TF1 Info

CULOTTÉ ! - "Répugnante", "choquante", "d'utilité publique", "géniale"... Le moins que l'on puisse dire, c'est que la nouvelle pub du fabricant de serviettes hygiéniques Nana ne laisse pas indifférent. Alors que 1000 plaintes ont déjà été reçues par le CSA pour fustiger ces 30 secondes sur le sexe féminin, certains au contraire y voient une visée pédagogique.

Une pêche, un gâteau, un porte-monnaie voire même un coquillage, rien de choquant a priori, à part quand tout ce petit monde se dessine sous la forme d'une vulve. Tel est le parti pris de la nouvelle pub Nana qui a décidé, pour la première fois, de mettre en valeur le sexe féminin plutôt que les pouvoirs absorbants de ses protections hygiéniques. Et la marque ne s'arrête pas là puisqu'on y voit également une femme assise sur un lit regarder son entrejambe avec un miroir ou encore une serviette hygiénique tachée de sang rouge. 

Un "coup de maître" pour certains, une image "répugnante" pour d'autres. Il faut dire que ce spot de 30 secondes, intitulé "Vive la vulve",  n'est pas diffusé sous le manteau mais à la télévision et aux heures de grande écoute. Ce qui, au goût de nombreux internautes, semble trop révolutionnaire. A tel point qu'une pétition en ligne demandant son retrait des écrans compte plus de 8.000 signatures sur change.org, tandis qu'un millier de plaintes ont été reçues par le CSA.

62% des femmes ne savent pas définir correctement ce qu'est une vulve, et près de la moitié d'entre elles pensent que la leur n'est pas 'parfaite'.
La marque Nana

Un débat incohérent pour la marque Nana, qui s'est fendue d'un droit de réponse sur son site pour expliquer ce choix : "62% des femmes ne savent pas définir correctement ce qu'est une vulve, et près de la moitié d'entre elles pensent que la leur n'est pas 'parfaite'. Nous voulons briser les tabous, nous souhaitons que les femmes perçoivent leur vulve de façon décomplexée. Après tout, la honte et la gêne vis-à-vis de cette petite (mais incroyable) partie de notre corps peuvent avoir un impact très négatif sur la confiance en soi", peut-on lire. 

Même incompréhension pour Justine Courtot, l'auteure d'un documentaire sur les règles intitulé 28 jours, et diffusé l'année dernière sur YouTube : "J'ai lu un peu partout que cette pub dénigrait la femme alors que ce n'est que de l'anatomie. Pour briser le tabou, il faut au contraire montrer le sexe féminin et ce qui se passe à l'intérieur de notre culotte", nous explique-t-elle. "La forme phallique est plus facilement présente dans le quotidien sans que ça ne choque personne. Et là, on voit une forme qui ressemble à une vulve et c'est l'indignation. Quel paradoxe !"

Pour la jeune femme, qui répond quotidiennement sur son compte Instagram, le bien nommé sang-sations, à des questions sur les menstruations venant de jeunes filles âgées de 12 à 16 ans, le plus étonnant est finalement que la vindicte vienne des femmes elles-mêmes. "Quand on tient un compte comme le mien, on s'aperçoit que les insultes ne viennent jamais des hommes, ce qui montre que le chemin à parcourir est encore long. Est-ce une peur, un manque d'éducation ? Je peux comprendre que dans certains foyers cela puisse être compliqué de parler de ces sujets, mais justement cette publicité qui passe à la télé offre un moyen idéal de s'emparer de ces questions intimes. Ainsi, si une jeune fille s'interroge sur ce qu'elle voit sur ces images, cela peut ouvrir un dialogue", dit-elle.

"Le sang n'est pas bleu"

Et cette discussion semble, ô combien nécessaire, au vu des interrogations que reçoit la jeune femme sur son compte Instagram. "Combien de jeunes filles m'ont déjà écrit pour me dire que le jour où elles ont eu leur premières règles, elles n'ont pas pu le dire à leur mère pendant plusieurs jours, pensant qu'elles allaient mourir. La méconnaissance est énorme sur ce sujet. Justement parce que depuis toujours, le sang représenté dans les pubs est bleu ou violet", explique-t-elle. 

Car voilà bien un autre tabou levé par cette publicité : on y voit furtivement du sang rouge sur une serviette hygiénique. Une autre façon de balayer d'un revers de main des années de pipette bleue, jugée moins "répulsive". "Cela montre que la société est peut être en train de changer. Quelle avancée pour les générations à venir ! Si elles commencent à voir du sang rouge à la télé quand on parle de règles, ou entendent juste des femmes dire qu'elles ont leurs règles, ce qu'elles ne voient pas dans les séries, je me dis qu'au fur et à mesure ce tabou peut disparaître", se réjouit Justine Courtot, qui reste persuadée qu'il est temps d'en parler ouvertement.


Virginie FAUROUX

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