Peut-on apprendre une langue étrangère en regardant des séries ?

Publié le 17 octobre 2019 à 15h27, mis à jour le 21 octobre 2019 à 14h48

Source : JT 20h WE

MY TAYLOR IS RICH - "Grey's Anatomy", "La Casa de Papel", "Stranger Things"... Votre ado est accro aux séries ? Il pourrait bien améliorer son anglais ou tout autre langue étrangère en regardant son film préféré...

Et si les séries télés constituaient un excellent outil pour apprendre les langues étrangères ? Selon une étude réalisée par Babbel, un site d'apprentissage de langue, 46% des Français ont déclaré regarder des séries en VO pour améliorer leur prononciation et leur compréhension (78%) ou encore enrichir leur vocabulaire (60%). Certes, pour Jean-Luc Breton, professeur d'anglais dans un lycée parisien et secrétaire général de l'Association des professeurs de langues vivantes (APLV), "c'est une bonne approche mais il ne peut s'agir d'un apprentissage en soi". 

Quant à savoir si on peut devenir bilingue, selon lui, il ne faut "absolument pas" l'espérer : "La difficulté quand on regarde une série, c'est qu'on ne fait travailler que les compétences de réception. On ne parle pas, on n'essaie pas d'exprimer une pensée". En outre, note-t-il, "les séries télé ne sont pas dans la langue qu'ont apprend à l'école, ce sont des tournures plus familières, notamment dans les séries américaines où on trouve parfois un langage argotique". 

Mais regarder des séries, reconnaît le professeur, peut être un bon vecteur de "motivation" : "Si les jeunes sont intéressés par ce qu'ils regardent, ils vont forcément mieux s'imprégner de la version originale. Une méthode comme une autre pour acquérir quelques bases", nous dit-il. D'autant que les séries et leur ancrage dans la société offrent aux jeunes un "effet miroir", "ce qui fait qu'ils peuvent reproduire certains dialogues dans leur vie à eux. Et cette culture là, il n'y a que le visuel qui peut la véhiculer et non les textes". 

Avec ou sans sous-titres ?

A chacun sa méthode pour apprendre la langue en fonction de l'objectif recherché. "Si votre ado souhaite améliorer son vocabulaire dans une langue étrangère, je conseille de regarder le même épisode plusieurs fois. D'abord, on fait une sorte de bilan de ce qu'on a compris. Puis, on le regarde à nouveau, détaille Jean-Luc Breton. Je crois que la répétition (3 à 4 fois) permet d'appréhender le sens des mots chaque fois un peu plus. L'idée c'est d'y aller par pallier". Du côté des sous-titres, tout dépend du niveau de votre enfant. "Les élèves qui ont le plus de difficultés, notamment les pré-ados, vont plutôt avoir besoin d'en mettre. Et plus ils vont avancer en âge et en compétences et moins ils vont vouloir de cette béquille. Ils regarderont leur série avec des sous-titres en langue étrangère ou alors ils s'en passeront. De leurs côtés, les plus motivés et les plus à l'aise n'en auront pas besoin", souligne-t-il.

 À noter qu’il est aussi possible de "tricher" en utilisant un système de sous-titres intelligents comme LLN (pour Language Learning with Netflix) ou Fleex, qui aident à traduire les passages difficiles en affichant à la fois les sous-titres dans la langue étudiée et dans la langue maternelle du spectateur. Par ailleurs, cet outil met automatiquement la vidéo sur pause après chaque ligne de dialogue. Un détail qui a toute son importance puisqu’il permet de ne louper aucun mot et de s’attarder sur la traduction, mais qui laisse toutefois perplexe notre professeur d'anglais : "Cela me paraît plus une pratique pédagogique, or le grand avantage des séries, c'est l'aspect motivation, donc on n'a pas forcément envie que cela devienne un cours d'anglais ou d'espagnol. Est ce qu'un ado qui regarde tout seul à la maison une série va vouloir faire une pause alors qu'il est pris par l'action de son film ? Rien n'est moins sûr..." 

Les langues, c'est vraiment une histoire d'amour. Or en France, il y a un problème de méthode.
Jean-Luc Breton, professeur d'anglais

Quant à savoir s'il vaut mieux que votre enfant maîtrise quelque peu la langue étrangère du film qu'il visionne, ce n'est pas une obligation. "Regardez par exemple l'engouement actuel d'un certain nombre de jeunes pour l'Asie, on s'aperçoit qu'il vient de l'intérêt pour les mangas ou les séries en japonais ou en coréen, ce qui leur a donné ensuite envie d'étudier ces langues. Même chose pour l'attrait de l'allemand à une certaine époque, dû à un groupe de rock qui séduisait les jeunes filles". 

Une autre façon, finalement, de se mettre le pied à l'étrier. Car tout est bon pour redorer le niveau des élèves français en langues étrangères. D'autant que pour Jean-Luc Breton, le nerf de la guerre reste encore une fois le plaisir. "Les langues, c'est vraiment une histoire d'amour, analyse-t-il. Or en France, il y a un problème de méthode. A mon sens, les enseignants ne sont pas assez bien formés. Ils sont encore dans une façon de fonctionner trop traditionnelle, sur l'apprentissage de la grammaire notamment, ce qui ne sert pas à grand chose pour progresser, sans parler du côté rébarbatif. D'où le manque d'attrait de certains élèves. Par ailleurs,  si l’on réussit si bien dans les pays scandinaves et baltes, c’est que l’on y apprend les langues de manière plus intense, à raison de 3 à 5 heures par semaine, et en petit groupe de 15 élèves par classe !". A méditer...


Virginie FAUROUX

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