Mort du patron de Wagner : Evgueni Prigojine, l'ancien "cuisinier" de Poutine devenu traître

par M.M avec AFP
Publié le 23 juin 2023 à 23h37, mis à jour le 24 août 2023 à 13h30

Source : TF1 Info

Le patron du groupe paramilitaire Wagner a perdu la vie, ce mercredi 23 août, dans un crash aérien en Russie.
Il était à bord d'un avion qui devait relier Moscou à Saint-Pétersbourg.
Ancien proche de Vladimir Poutine, le chef de guerre est tombé en disgrâce en juin dernier après une rébellion avortée de sa milice contre l'état-major.

L'information est tombée, mercredi 23 août, dans la soirée. Le chef de la milice Wagner, Evgueni Prigojine, est mort dans le crash d'un avion avec au moins sept autres personnes. Une information confirmée par la chaîne Telegram du groupe puis par Moscou. L'accident s'est produit alors qu'Evgueni Prigojine se trouvait dans la région de Tver, en Russie, à bord d'un appareil qui devait relier Moscou à Saint-Pétersbourg. 

Ancien proche de Vladimir Poutine, le chef de guerre est tombé en disgrâce ces derniers mois après une rébellion avortée de sa milice contre l'état-major. Ce qui n'était qu'un conflit larvé s'est transformé en guerre ouverte le vendredi 23 juin, quand Evgueni Prigojine a accusé l'armée russe d'avoir mené des frappes meurtrières sur des camps de ses combattants, en appelant à se soulever contre le commandement militaire en plein conflit en Ukraine.

Exil en Biélorussie

L'homme d'affaires disait alors disposer de "25.000" combattants et avait appelé les militaires russes et la population à le "rejoindre". Il s'était toutefois défendu de tout "coup d'État militaire" et affirmait mener une "marche pour la justice", soulignant que les commandants de Wagner avaient décidé qu'il fallait "stopper" ceux qui ont "la responsabilité militaire du pays"

Des déclarations qui lui ont valu l'ouverture d'une enquête du FSB pour "appel à la mutinerie". Et qui venaient conclure une longue séquence de désaccords houleux entre cet homme d'affaires sulfureux et l'état-major russe, en dépit de son renoncement au coup de force au bout de 24 heures, négociant un exil pour lui et ses fidèles en Biélorussie, lui permettant d'échapper à la prison, à la justice.

Au final, c'est semblait-il d'Afrique qu'il publie une vidéo cette semaine, où il assure agir pour la grandeur de la Russie sur ce continent, où ses hommes font depuis des années les basses œuvres du Kremlin. Centrafrique, Mali, Libye, Syrie... Wagner, dont le pouvoir russe ne reconnaissait même pas l'existence jusqu'à fin 2022, s'est fait un nom en dix ans comme le complice des régimes voulant se défaire de parrains occidentaux ou en quête de combattants discrets et impitoyables.  

Détenu à l'époque soviétique

Evgueni Prigojine a passé neuf ans en détention à l'époque soviétique pour des délits de droit commun. Il sort en 1990, alors que l'URSS est en train de s'effondrer, et monte une affaire à succès de vente de hot-dogs. Il monte ensuite en gamme, jusqu'à ouvrir un restaurant de luxe qui devient l'un des plus courus de Saint-Pétersbourg, où Vladimir Poutine connaît en parallèle sa propre ascension politique.

Après l'accession en 2000 de Vladimir Poutine à la présidence, son groupe de restauration officie au Kremlin, ce qui lui vaut le surnom de "cuisinier de Poutine" et la réputation d'être devenu milliardaire grâce aux contrats publics. C'est cet argent qu'il aurait donc utilisé pour fonder Wagner, armée privée d'abord composée de vétérans endurcis de l'armée et des services spéciaux russes. 

Propagande et "ferme à trolls"

Âgé de 61 ans, il passe de l'ombre à la lumière en septembre 2022, au moment où l'armée russe subissait revers sur revers en Ukraine, une humiliation pour les va-t-en-guerre dont il fait partie. Il sort alors du bois en admettant, pour la première fois, qu'il est bien le fondateur en 2014 du groupe paramilitaire Wagner, actif en Ukraine comme en Syrie, mais aussi en Afrique. Et s'impose comme un meneur.

Il reconnaît aussi avoir créé une "ferme à trolls" pour mener des campagnes de propagande sur Internet. Il a d'ailleurs été inculpé en 2018 aux États-Unis pour ingérence dans les élections de 2016. 

Maître de la provocation

En octobre, il pousse cette logique de réclame plus loin encore, installant en grande pompe dans un immeuble de verre de Saint-Pétersbourg (nord-ouest) le siège de la "compagnie militaire privée Wagner". Maître de la provocation, il publie en février une vidéo le montrant à bord d'un avion de guerre où il propose au président ukrainien, Volodymyr Zelensky, de décider le sort de Bakhmout au cours d'un duel aérien.

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En mai 2023, après des mois de durs et sanglants combats, Evgueni Prigojine atteint la consécration en revendiquant la prise de cette ville de l'est de l'Ukraine, théâtre d'âpres et longs combats, célébrant une rare victoire sur le champ de bataille pour les forces russes. Mais c'est aussi à l'occasion de cette bataille que les tensions avec l'état-major s'accentuent : Prigojine l'accuse de priver Wagner de munitions et multiplie les vidéos dans lesquelles il insulte les commandants russes. Impensable pour n'importe qui d'autre en Russie, dans un contexte de répression totale.


M.M avec AFP

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