VIDÉO - Géorgie : que se passe-t-il à Tbilissi où une foule se dresse contre un projet de loi sur les "agents de l'étranger" ?

par V. F
Publié le 8 mars 2023 à 20h03, mis à jour le 8 mars 2023 à 22h08

Source : TF1 Info

Depuis le début de la semaine, à Tbilissi, la capitale de Géorgie, la tension monte.
Des milliers de Géorgiens protestent contre un projet de loi controversé, calqué sur une loi russe, visant médias et ONG.
Dès son adoption mardi soir, des heurts avaient éclaté entre opposants et policiers.

Un projet de loi sur les "agents de l'étranger" a été adopté mardi 7 mars en première lecture par le parlement géorgien, mettant le feu aux poudres parmi la population. Il faut dire que ce texte, dénoncé comme la copie d'une loi russe liberticide, prévoit que les organisations recevant plus de 20% de leur financement de l'étranger soient obligées de s'enregistrer en tant qu'"agents de l'étranger", sous peine d'amendes. Selon ses détracteurs, ce projet rappelle en effet une loi similaire adoptée en Russie en 2012 et que le Kremlin utilise pour réprimer les médias et les voix critiques.

77 personnes interpellées

Dès son adoption, des milliers d'opposants se sont rassemblés à Tbilissi, la capitale, des protestations dispersées à coups de gaz lacrymogènes et de canons à eau. Le ministère géorgien de l'Intérieur a affirmé qu'au moins 77 personnes avaient été interpellées à cette occasion et 50 policiers blessés. Mais le gros de la mobilisation a eu lieu ce mercredi avec des dizaines de milliers de manifestants, réunis devant le Parlement national dans le centre-ville, certains brandissant des drapeaux de la Géorgie et de l'Union européenne. Ce face à face tendu entre opposants et policiers a une nouvelle fois été dispersé à l'aide de gaz lacrymogènes et de canons à eau. 

undefinedundefinedVANO SHLAMOV / AFP
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Cette loi va à l'encontre de la volonté du peuple géorgien de devenir membre de l'UE.
Badri Okoujava, un jeune historien de 26 ans

"Non à la loi russe !", a scandé la foule rassemblée à l'appel de plusieurs ONG et formations d'opposition. "Cette loi est absolument anticonstitutionnelle et elle va à l'encontre de la volonté du peuple géorgien de devenir membre de l'UE", fustige Badri Okoujava, un jeune historien de 26 ans cité par l'AFP. La Géorgie, une ex-république soviétique marquée par une guerre contre la Russie en 2008, ambitionne de rejoindre l'UE et l'Otan. Plusieurs récentes mesures du gouvernement ont toutefois jeté le doute sur ces aspirations.

"L'idéologie de ce gouvernement est déconnectée de celle de la civilisation occidentale", déplore Giorgi Labouchidzé, 33 ans. "Nous ne leur permettrons pas de faire en sorte que la Russie définisse notre avenir", appuie auprès de l'AFP Elène Ksovréli, une adolescente de 16 ans. Les chiffres du nombre de manifestants donnés par la police et l'opposition n'étaient toutefois pas disponibles dans l'immédiat.

Critiques internationales

Le président du parti au pouvoir, Rêve géorgien, Irakli Kobakhidze a dénoncé l'action de "radicaux" et dresse un parallèle entre ces protestations et la révolution pro-européenne de Maïdan en Ukraine, en 2014. "L'Ukraine, au final, a perdu 20% de son territoire" après cette révolution, a-t-il affirmé, en référence aux territoires ukrainiens conquis par Moscou depuis l'annexion de la Crimée et l'invasion russe de l'Ukraine de février 2022. 

Signe de l'inquiétude grandissante en Occident, le chef de la diplomatie de l'Union européenne, Josep Borrell, a condamné mercredi le projet de loi, le jugeant "incompatible" avec les valeurs de l'UE et l'objectif de rejoindre le bloc européen. Les États-Unis ont par ailleurs appelé les autorités géorgiennes à "respecter les manifestations pacifiques", se disant "solidaires du peuple géorgien". "Nous appelons le gouvernement de la Géorgie à respecter la liberté de rassemblement et les manifestations pacifiques", a déclaré le porte-parole du département d'État américain, Ned Price, réitérant la "préoccupation" des 

États-Unis face à cette loi. 

La présidente géorgienne, Salomé Zourabichvili, a, elle, demandé que la loi soit "abrogée", promettant d'y apposer son veto. Ce veto pourra toutefois être surmonté par le parti au pouvoir, Rêve géorgien, qui contrôle plus de la moitié des sièges au Parlement. Selon Irakli Kobakhidze, la deuxième et la troisième lecture du texte ne pourraient toutefois avoir lieu qu'en juin, après la revue du projet de loi par la Commission de Venise, un organe consultatif du Conseil de l'Europe. 

Ces dernières années, les autorités géorgiennes ont dû faire face à des critiques internationales croissantes sur un recul présumé de la démocratie qui a porté atteinte aux liens de Tbilissi avec Bruxelles. La Géorgie a déposé sa candidature pour l'UE avec l'Ukraine et la Moldavie, quelques jours après l'invasion russe du territoire ukrainien le 24 février 2022.

En juin, l'UE avait accordé un statut de candidat à l'Ukraine et à la Moldavie, mais demandé que la Géorgie procède à plusieurs réformes avant d'obtenir un statut similaire.


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