Dans le "Bataillon sibérien", ces Russes opposés à Poutine qui rejoignent l'armée de Kiev

Publié le 26 octobre 2023 à 14h11, mis à jour le 26 octobre 2023 à 14h22

Source : Sujet TF1 Info

L'armée ukrainienne a recruté des Russes désireux de combattre contre leur camp.
Ces citoyens russes forment un groupe baptisé "Bataillon sibérien".
Zoom sur ces volontaires qui expliquent pourquoi ils ont quitté la Russie pour rejoindre l'armée de Kiev.

On connait bien l'histoire de ces volontaires étrangers prêts à combattre l'armée de Moscou au sein de la "Brigade internationale" des forces armées ukrainiennes. Mais un peu moins celle de ces Russes qui choisissent de se battre contre leur propre camp. Après plus de 600 jours de guerre, l'armée ukrainienne a dévoilé ce mardi 24 octobre une unité composée uniquement de citoyens russes. Réunis derrière le nom "Bataillon sibérien", ils attendent d'être déployés sur le front.

Des opposants à "l'impérialisme russe"

Contrairement aux groupes de volontaires russes indépendants de l'armée de Kiev, comme la Légion de la liberté de la Russie, ces soldats font officiellement partie de l'armée ukrainienne régulière. Le 24 octobre, plusieurs journalistes ont pu les rencontrer dans un stand de tir à l'extérieur de Kiev. Composé de 50 citoyens russes, selon un officier militaire ukrainien cité par Reuters, ils viennent tous de Russie, mais arborent fièrement l'uniforme des forces armées ukrainiennes. Un paradoxe qui n'étonne pas leur instructeur. "Si les gens veulent se battre pour l'Ukraine, pour nos frontières, pour l'effondrement du régime soviétique russe, pourquoi pas ?", a-t-il témoigné auprès de Bloomberg. "C'est leur choix et cela montre que tous les Russes ne soutiennent pas Poutine." L'armée de Kiev assure toutefois n'avoir fait preuve d'aucune naïveté. La totalité des membres de cette unité ont subi des contrôles de sécurité approfondis pour vérifier qu'ils étaient des partisans de l'Ukraine. 

Venus de tous les coins de Russie, ils sont néanmoins essentiellement originaires des peuples indigènes de Sibérie. Soit précisément issus de ces régions éloignées où la population a fourni un nombre disproportionné de soldats à l'armée russe. C'est par exemple le cas de "Gennadiy", un jeune homme de 29 ans. Venu des rives du lac Baïkal, au nord de la frontière mongole, il a vu plusieurs voisins partir sur le front du côté russe, attirés par des salaires exorbitants. Mais lui a préféré choisir l'Ukraine, dont le drapeau jaune et bleu orne désormais sa manche. Car il s'insurge contre la "russification pure et simple" dont la Bouriatie a déjà été témoin par le passé, "quand la Russie tsariste nous a colonisés, a détruit notre culture, notre langue et nos traditions". "Nous devons détruire le régime du Kremlin", lance à son tour "Vargan", un jeune homme de 29 ans qui admet n'avoir aucune expérience militaire. Lui aussi a parcouru des milliers de kilomètres depuis la Sibérie pour rejoindre l'armée ukrainienne. Originaire de la région russe de Yakoutie, riche en diamants, il désespère de voir ce territoire "très riche où les gens sont si pauvres". "Seuls les fonctionnaires qui servent Poutine prospèrent".

REPORTAGE - Ces ces volontaires étrangers prêts à combattre contre la RussieSource : JT 20h Semaine

Comme Gennadiy et Vargan, les recrues du "Bataillon sibérien" partagent une opposition à ce qu'ils appellent l'impérialisme russe. Même sans en avoir été directement victime. "Je ne veux pas participer aux crimes terribles commis par mon pays à l'intérieur de ses propres frontières", témoigne par exemple auprès de Reuters un homme de 41 ans originaire de la région de Moscou. Un discours anti-Kremlin qui peut coûter cher à ces citoyens russes. Après avoir signé un contrat militaire, ils ont pu adopter des indicatifs pour protéger leur véritable identité. C'est pourquoi ce soldat a choisi le surnom de "Gandhi", en référence à sa fascination pour cette figure du mouvement pour l'indépendance de l'Inde. Lui affirme avoir quitté la Russie peu après l'invasion et s'être rendu en Ukraine via la Pologne pour "défendre la vie"  de ses voisins. "J'ai eu le sentiment qu'en tant que Russe, j'étais responsable de cette situation." Comme lui, Ildar Dadin a aussi rejoint les rangs du "Bataillon sibérien" pour son militantisme anti-Poutine. Pour lui, cette guerre n'est pas seulement pour l'Ukraine, mais pour "la liberté du peuple". "Ce qu'il faut faire maintenant, c'est parvenir à la défaite de la Russie de Poutine", dit-il à l'AFP, en espérant que cela déclenchera un changement politique en Russie. "Et pour cela, nous avons besoin de la victoire de l'Ukraine."


Felicia SIDERIS

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