Botulisme à Bordeaux : le restaurateur avait la "sensation" que les bocaux "étaient clean", assure son avocat sur LCI

par M.L
Publié le 3 octobre 2023 à 10h50

Source : TF1 Info

Un restaurateur bordelais a été entendu par la police vendredi dernier dans le cadre d'une enquête sur 15 "cas suspects de botulisme", dont un mortel, parmi des clients de son bar à vin.
Il affirme avoir pris toutes les précautions nécessaires en servant ses bocaux de sardines, mais il pourrait avoir commis "une erreur humaine", explique son avocat sur LCI.
Le gérant devrait vraisemblalement mettre la clef sous la porte.

Il a été sommé de s'expliquer. Le patron du Tchin Tchin Wine Bar à Bordeaux a été interrogé vendredi matin selon nos informations, dans le cadre d'une enquête après la détection début septembre de 15 "cas suspects de botulisme", une affection neurologique rare et grave. Parmi eux, une femme de 32 ans est décédée. Tous les clients avaient consommé des sardines en conserves artisanales, confectionnés par le restaurateur. Le gérant "a évidemment conscience de ce qu'il s'est passé, de la gravité de la situation sanitaire et de santé de ces personnes", dont il est "très inquiet", a affirmé mardi sur LCI son avocat, Stéphane Guitard. Il a aussi répété que son client ne s'expliquait pas ces cas de botulisme, ayant assuré aux policiers avoir "la sensation" que les bocaux servis à ce moment-là "étaient clean"

L'avocat a d'abord indiqué ne pas avoir d'information sur le nombre de clients toujours pris en charge à l'hôpital. "Nous savons seulement que certaines personnes seraient encore hospitalisées en réanimation, sous respirateur artificiel", a-t-il indiqué, expliquant qu'il s'agissait là de "la principale inquiétude" de son client, qui "souhaiterait lui-même avoir des informations sur l'état de santé de ces personnes"

"Peut-être s'était-il trompé"

Une enquête préliminaire a été ouverte depuis le 15 septembre pour "homicide involontaire" et "blessures involontaires", ainsi que "mise sur le marché de denrées préjudiciables à la santé" et "vente de denrées corrompues ou toxiques", par le parquet de Bordeaux. Le restaurateur "a évidemment conscience de ce qu'il s'est passé, de la gravité de la situation sanitaire et de santé de ces personnes", a insisté Stéphane Guitard. "En revanche, il a beaucoup d'interrogations sur la façon dont le processus de stérilisation s'est déroulé, et des conséquences que cela a pu avoir sur ces bocaux faits maison composés de sardines", a-t-il poursuivi. 

Selon l'avocat, le patron du bar dégustation confectionnait depuis 2021 ces bocaux de poissons, sans jamais rencontrer de problèmes. "Il a indiqué aux enquêteurs avoir fait environ 150 bocaux de sardines qu'il a vendus à des clients et pour lesquels il n'y a jamais eu de difficultés, avant cette malheureuse semaine", a-t-il rapporté, précisant que son client, qui tient ce bar de dégustation depuis cinq ans, avait obtenu un BEP cuisine "il y a quelques années" et avait suivi une "formation préalable à l'ouverture du restaurant sur l'hygiène alimentaire".

Au moment de l'intoxication de plusieurs clients, le restaurateur avait repéré quatre bocaux sur les 23 confectionnés dans les jours précédents, relevant "une odeur présente avec l'absence du bruit caractéristique de la stérilisation des bocaux", un "bruit caractéristique de l'ouverture d'un bocal avec son élastique", a-t-il ajouté. Mais il n'a donc "pas servi" ces sardines. Il a en revanche proposé aux clients, "selon ses dires", "une dizaine ou une douzaine de bocaux" qui "n'avaient aucune odeur" et pour lesquels "il avait la confirmation selon lui, la sensation qu'ils étaient clean", a expliqué l'avocat, laissant entendre que ces conserves avaient présenté ce "bruit caractéristique" de stérilisation, car "le botulisme n'est pas générateur en soi d'odeurs". "Mais peut-être s'était-il trompé, il s'agit peut-être d'une erreur humaine", a toutefois reconnu Stéphane Guitard.

"Il va être obligé de cesser son activité"

Désormais, son client se trouve dans un "double état d'esprit". "Il pense avant tout aux personnes victimes de ce botulisme, il est très inquiet pour leur état de santé pour ceux qui sont encore en vie. Et puis il s'inquiète aussi pour sa situation personnelle", a souligné l'avocat. "La direction départementale de la protection de la population de la région Aquitaine a décidé non pas la fermeture de son établissement, mais c'est tout comme. Il s'agit d'une suspension de son activité dans l'attente de l'accomplissement de différentes conditions aujourd'hui irréalisables, notamment le nettoyage sanitaire de cet établissement par des entreprises homologuées, qui n'existe pas", a-t-il affirmé. 

Le patron sera vraisemblablement contraint de fermer son établissement. "Je pense que nous allons discuter très sérieusement avec lui des conditions dans lesquelles il va être obligé de cesser son activité", puisqu'il n'a pour l'heure "pas la possibilité de générer un chiffre d'affaires suffisant pour payer ses charges", a annoncé son avocat. 

Son client ne se faisait pas d'illusion sur la probable fermeture de l'établissement, après le retentissement d'un tel scandale sanitaire. Le patron et son épouse, avec qui il tenait le bar, "étaient très bien notés sur différents sites Internet, leur activité fonctionnait plutôt bien, et ils sont des passionnés, ils aiment la cuisine et le vin", et ce serait donc "un crève-cœur pour eux que de fermer cet établissement", a souligné l'avocat. "Mais ce n'était pas tout à fait sensé de pouvoir imaginer qu'il puisse fonctionner normalement dans ces conditions", a-t-il reconnu. Il n'a en revanche pas évoqué les peines encourues par le gérant qui, selon les chefs visés, oscillent entre deux et cinq ans de prison et 45.000 à 600.000 euros d'amende.


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