Cauchemar en cuisine : des restaurants insalubres affichés par des préfets sur les réseaux sociaux

par Virginie FAUROUX | Reportage TF1 : Amandine Creff et Séverine Fortin
Publié le 24 avril 2024 à 18h44

Source : JT 13h Semaine

Avec la perspective des Jeux Olympiques, le gouvernement annonce 100.000 contrôles sur la qualité des restaurants cette année.
Des préfets ont choisi de frapper encore plus fort en diffusant sur les réseaux sociaux les noms et les photos de ceux qui ne respectent pas les règles d'hygiène.
Il faut dire que ce que les inspecteurs découvrent sur le terrain est parfois effarant, comme a pu le constater une équipe de TF1.

Ils n'ont prévenu personne. Amandine et Florent, inspecteurs d'hygiène alimentaire, viennent contrôler un restaurant d'Eure-et-Loir suite à deux signalements d'intoxication alimentaire. À peine le temps d'enfiler leurs blouses qu'ils remarquent déjà des anomalies dans la chambre froide où la température est beaucoup trop élevée. "Le thermomètre ne sert à rien et en plus, il est moisi. Ensuite, on a de la viande conservée dans le même contenant que du poisson et des coquilles, du saumon, des choses comme ça. Toutes ces choses-là, ça ne va pas du tout. Là, on est à 7,8°C, donc on n'est pas inférieur à 4°C comme ça devrait l'être", énumère Florent Caron dans le reportage de TF1 ci-dessus. De la moisissure apparaît aussi sur les murs. "Ça coule, ça prend toute la crasse, toute la moisissure, et puis ça descend. Donc si ça se retrouve juste en dessous sur la nourriture, c'est dommage", ajoute l'inspecteur.

Un certain nombre de contrevenants ne respectent pas cette obligation de fermeture et évoquent d'autres raisons imaginaires comme 'fermeture pour cause de travaux'.
Hervé Jonathan, préfet d'Eure-et-Loir

En cuisine également, les fautes s'accumulent et la saleté avec. "Vous nettoyez jamais là, c'est pas possible", lance Amandine, avant d'expliquer. "Sur la cuisinière, ça va se désagréger, potentiellement créer des bactéries. Et comme ils font cuire leurs plats juste au-dessus, ça peut contaminer les produits", affirme-t-elle. Munie de son téléphone, l'inspectrice photographie tout ce qui n'est pas conforme. Autant de preuves transmises au préfet qui décidera ou non de fermer le restaurant. Ce midi, c'est certain, le service n'aura pas lieu, car côté buffet, si tout est déjà prêt, rien ne va. "11,8°C, on n'est pas bon, ça devrait être inférieur à 2°C. L'autre partie froide, on va tout jeter", assène Florent.

Il faut en effet tout jeter pour éviter l'intoxication alimentaire. Le contrôle terminé, les deux agents annoncent leur bilan à la restauratrice. "Si on peut graduer les conclusions suite à notre inspection : A, c'est très bien, D, c'est très mauvais. Eh bien, on serait plutôt sur du D", lui dit-il. En conséquence, c'est la fermeture automatique du restaurant jusqu'à nouvel ordre. "On va faire le nécessaire pour que ça soit conforme", assure la propriétaire. 

Cette fermeture administrative a été annoncée à grand bruit sur les réseaux sociaux par le préfet lui-même, qui va jusqu'à donner le nom de l'établissement en infraction et la ville dans laquelle il se trouve. "Nous avons vu qu'un certain nombre de ces contrevenants ne respectaient pas cette obligation de fermeture et évoquaient d'autres raisons imaginaires comme 'fermeture pour cause de travaux'. Et donc c'était une nouvelle tromperie du consommateur", souligne Hervé Jonathan, préfet d'Eure-et-Loir. 

Ce préfet n'est pas le seul à avoir adopté cette méthode. Le préfet du Val-d'Oise, mais aussi celui de l'Hérault, la pratiquent. Cette communication interpelle les habitants des départements concernés. "Quand on voit les photos, on se dit : 'Ah, j'ai mangé là hier, pas sûr que je vais y retourner'", aréagit un riverain. Tandis qu'une retraitée trouve ça "très violent et très direct", mais admet que "c'est utile". 

De leurs côtés, certains commerçants tirent la sonnette d'alarme, comme la boulangerie "Gusto" à Dreux, contrôlée il y a un mois. Pendant leur inspection, les inspecteurs constatent plusieurs défauts dans les locaux. Amal, responsable du commerce, se voit alors dans l'obligation de fermer à la clientèle. Avant de reprendre la fabrication du pain, des travaux sont exigés. Dix jours après la fermeture, un nouveau contrôle l'autorise à rouvrir, mais la communication du préfet est une publicité dont elle se serait bien passée. "C'était un peu violent. Nos clients commencent à revenir petit à petit, heureusement. On essaye de rester debout, on essaye de garder le sourire", lâche-t-elle, un peu amère. Depuis le début de l'année, sur 65 commerces de bouche contrôlés en Eure-et-Loir, 14 ont fermé car ils ne respectaient pas les normes d'hygiène. 


Virginie FAUROUX | Reportage TF1 : Amandine Creff et Séverine Fortin

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