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Fermeture de l'A13 : l'État peut-il rendre l'A86 et l'A14 gratuites comme le réclament des élus ?

Publié le 23 avril 2024 à 13h06, mis à jour le 29 avril 2024 à 8h59

Source : JT 20h WE

Avec la fermeture de l'A13 jusqu'au 30 avril inclus, le trafic s'est déporté sur deux routes nationales qui risquent la saturation.
Pour éviter ce problème, des élus locaux demandent la gratuité de deux autres axes autoroutiers, l'A14 et le tunnel de l'A86.
Une mesure tout à fait possible, sous réserve d'indemnisation de la part de l'État.

Les concessionnaires autoroutiers sont sous pression. Mais c'est l'État qui aura le dernier mot. Alors qu'une portion de l'A13 restera encore fermée jusqu'au 30 avril inclus après la découverte d'une fissure, plusieurs élus locaux appellent le gouvernement à éviter la saturation des itinéraires alternatifs. Car pour les quelque 100.000 usagers de cette route qui relie le boulevard périphérique parisien et l'A86, les déviations mises en service passent par des routes nationales. De quoi faire peser sur ces axes alternatifs un risque de saturation.

C'est pourquoi plusieurs élus locaux, dont le député (Renaissance) Karl Olive et le maire (DVD) de Saint-Cloud, demandent la gratuité des autoroutes qui peuvent servir de solution de repli, à savoir l'A14 et le tunnel de l'A86. Une proposition également portée par Valérie Pécresse. Face à la "galère effroyable pour les Franciliens et les Normands", la présidente de la région Île-de-France (LR) a demandé ce lundi 22 avril à l'État "de prendre en charge la gratuité de l'A14". Mais cette mesure est-elle envisageable ?

Une mesure possible ... contre compensation

La question se pose, puisque les deux routes sont gérées par des entreprises privées. L'A14, l'autoroute considérée comme la plus chère de France, a en effet été concédée à la SAPN, la société des autoroutes Paris-Normandie, filiale du Groupe Sanef. Du côté du Duplex, ce tunnel de l'A86, il est exploité par Cofiroute, une filiale de Vinci autoroutes. Or, à l'heure actuelle, "rien dans les contrats" signés entre l'État et les concessionnaires ne prévoit un tel cas de figure, comme le souligne Jean-Paul Markus, professeur de droit public.

Alors comment forcer ces entreprises privées ? Auprès de TF1info, le directeur de la rédaction des Surligneurs, un collectif spécialisé en legal-checking, estime que le gouvernement peut avoir le dernier mot. Au-delà de demander un avenant au contrat, l'État peut effectivement réaliser une "modification unilatérale du contrat". Ce professeur en droit public à l'Université Paris-Saclay affirme qu'il n'existe aucun obstacle à une telle mesure "puisque c'est l'État qui est concédant". À une condition toutefois : respecter le "coût financier". Ainsi, à partir du moment où une autoroute est concédée, sur le plan contractuel, l'État peut demander ou exiger une gratuité temporaire "sous réserve d'indemniser" l'entreprise. "L'équilibre financier du contrat de concession doit être maintenu". "La jurisprudence du Conseil d'état montre que l'État peut forcer le concessionnaire, de manière unilatérale, mais sous réserve d'indemnisation", argue-t-il. Une compensation financière qui pourrait prendre la forme d'une indemnisation directe de l'État ou d'une taxe sur les passagers. "Quoi qu'il en soit, il est hors de question pour le juge d'imposer à un concessionnaire des conditions d'exécution du contrat qui lui fasse perdre de l'argent", conclut notre interlocuteur.

L'équilibre financier du contrat de concession doit être maintenu
Jean-Paul Markus, professeur de droit public et membre des Surligneurs

Libre donc à l'État de prendre cette décision pour alléger le prix de la facture pour les automobilistes. Une mesure à laquelle le gouvernement réfléchit ? Interrogé à ce sujet, le ministère des Transports n'écarte pas cette idée. Auprès de TF1info, le ministère argue que pour l'heure, "les mesures de déviation mises en place, l'ajustement des circuits logistiques et l'adaptation du comportement des automobilistes" ont permis de "contenir les difficultés de circulation sur le réseau routier francilien à un niveau habituel". Le ministre des Transports, Patrice Vergriete, reste cependant "vigilant" sur cette question. "Aucune option n’est écartée en fonction de l'évolution de la situation", nous glisse son équipe. 

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Felicia SIDERIS

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