Impôts : les Français les plus riches moins taxés que les autres, selon une étude

par M.L (avec AFP)
Publié le 6 juin 2023 à 14h45

Source : 24H PUJADAS, L'info en questions

Les impôts personnels sont progressifs en France "jusqu’à un niveau élevé de revenu", selon une étude publiée ce mardi.
Mais le taux d'imposition connaît une "forte régressivité" pour les 0,1% des Français les plus riches.
Ces ménages sont en effet davantage soumis à l'impôt sur les sociétés plutôt qu'à l'impôt sur le revenu.
Les experts estiment toutefois que la réintroduction d'un impôt sur la fortune serait inefficace.

En France, la frange la plus aisée des ménages profiterait d'un taux d'imposition à la baisse. C'est ce que souligne une étude de l'Institut des politiques publiques (IPP) diffusée mardi, selon laquelle les revenus des 37.800 foyers français les plus riches sont proportionnellement moins imposés que ceux du reste de la population. "L’ensemble des impôts personnels reste progressif (proportionné aux revenus, NDLR) jusqu’à un niveau élevé de revenu", observent les quatre auteurs de cette note, basée sur des données de l'année 2016. Mais ils constatent "une forte régressivité du taux d’imposition global" une fois franchi le seuil des 0,1% de Français les plus riches

26% d'imposition pour les 75 foyers fiscaux les plus fortunés

Selon l'étude, les 37.800 foyers français les plus aisés, qui touchent plus de 627.000 euros annuels, ont un taux d'imposition global de 46%. Mais ce taux diminue au fur et à mesure que les revenus de ces ultrariches progressent, jusqu'à atteindre 26% pour les 75 foyers fiscaux les plus fortunés, qui représentent 0,0002% des Français les plus riches. Cela s'explique par la composition des revenus : ceux des Français les plus riches proviennent pour l'essentiel des bénéfices non distribués des entreprises, qui sont donc soumis à l'impôt sur les sociétés (IS) plutôt qu'à l'impôt sur le revenu (IR). Or "l’imposition des bénéfices des sociétés est plus faible que l’imposition des revenus personnels", relève la note.

"Ce transfert d’une assiette de revenus imposables à l’IR vers une assiette de revenus uniquement imposables à l’IS n'est pas neutre", insiste l'IPP. "Par ce biais, le taux des impositions assises sur le revenu et le patrimoine personnels, situé au plus haut autour de 59%, est remplacé par le taux bien plus bas de l’IS, de 33,33% en 2016", expliquent les auteurs. La note ne prend toutefois pas en compte les effets des réformes survenues depuis 2016, comme l'abaissement du taux d'impôt sur les sociétés de 33,3 à 25%, le remplacement de l'ISF par un impôt sur la fortune immobilière ou l'introduction d'un prélèvement forfaitaire de 30% sur les revenus du capital. 

Par ailleurs, "il ne faut pas conclure que la France est plus un paradis fiscal pour milliardaires que nos voisins", met en garde Laurent Bach, coauteur de la note. Les systèmes fiscaux néerlandais, suédois ou néo-zélandais sont également marqués par "une forme de régressivité en haut de la distribution des revenus", détaille l'IPP. 

L'impôt sur la fortune, une fausse bonne idée ?

Alors qu'un récent rapport de l'économiste Jean Pisani-Ferry suggérait de rétablir temporairement une forme d'impôt sur la fortune pour financer les coûteux investissements dans la transition écologique, ce type de prélèvement "n'a pu corriger la régressivité que nous documentons", avertissent les auteurs. "Pour les 'milliardaires', l’impôt sur le revenu ou l’ISF ne représentent qu’une fraction négligeable de leurs revenus globaux, alors que l’impôt sur les sociétés est le principal impôt acquitté", insistent-ils.

L'IPP juge en revanche "envisageable de taxer les revenus non distribués des holdings à l’impôt personnel sur le revenu" pour capter une partie des ressources des ultrariches qui échappent à l'impôt. Si la taxation sur ces sociétés qui possèdent des parts dans d'autres entreprises, dont elles dirigent ou contrôlent l'activité, "s’avérait générer de nouvelles formes d'optimisation, on pourrait envisager la taxation des actionnaires personnes physiques résidents fiscaux en France sur l'ensemble des résultats non distribués par les entreprises contrôlées", ajoute l'Institut. 

Mais l'hypothèse n'enchante guère le gouvernement : Bercy a souligné que les bénéfices non distribués "sont généralement réinvestis dans l'emploi et la croissance" des entreprises. L'exécutif croit davantage à l'impôt minimal mondial de 15% sur les bénéfices des multinationales. Sur ce sujet, "une solution viable sur le long terme ne peut être qu’internationale", glisse le ministère de l'Économie à l'AFP.


M.L (avec AFP)

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