L'autorité parentale des parents violents bientôt retirée ? Le débat s'ouvre à l'Assemblée

par M.L (avec AFP)
Publié le 9 février 2023 à 9h40

Source : Sujet TF1 Info

Les députés examinent ce jeudi une proposition de loi qui prévoit de lever automatiquement l'autorité des parents violents, s'ils sont condamnés par la justice.
S'ils sont mis en cause pour des faits d'inceste ou de violences conjugales dont l'enfant est témoin, ils pourraient voir leur autorité suspendue ou même retirée.

C'est une épineuse question que les députés sont appelés à trancher ce jeudi 9 février : un parent violent peut-il continuer d’exercer son autorité parentale ? L'Assemblée nationale examine une proposition de loi qui vise à mieux protéger les enfants dont les parents sont auteurs d'inceste ou de violences conjugales. "Aujourd'hui, le retrait de l'autorité parentale est possible, mais trop peu appliqué", explique à l'AFP sa rapporteure, la députée socialiste Isabelle Santiago. "Avec ce texte, nous voulons le rendre automatique en cas de condamnation, sauf si le juge décide le contraire de manière motivée."

La proposition de loi prévoit en effet de suspendre l'exercice de l'autorité parentale et les droits de visite et d'hébergement d'un parent poursuivi ou mis en examen pour inceste ou condamné pour violences conjugales "ayant entraîné une ITT de 8 jours", "lorsque l'enfant a été témoin des faits". Enfin, si le parent est condamné pour inceste, le texte prévoit le retrait de l'autorité parentale ou de son exercice, "par une décision expresse du jugement pénal". Le texte avait été adopté en commission mercredi 1er février à l'unanimité, par tous les groupes.

"Une première marche"

Concernant les violences conjugales, des femmes victimes estiment que l'autorité parentale conjointe avec un partenaire violent les met en danger. Quant à l'inceste, la Civiise a reçu de très nombreux témoignages de mères s'inquiétant de laisser partir leur enfant chez le père accusé de faits incestueux. Cette commission indépendante lancée en janvier 2021 a demandé la suspension de l'autorité parentale et des droits de garde et de visite du parent poursuivi pour inceste et son retrait "systématique" en cas de condamnation.

Chaque année en France, 160.000 enfants sont victimes d'inceste ou de violences sexuelles, selon elle. Par ailleurs, 400.000 enfants vivent dans des foyers où les violences conjugales sont permanentes. Dans l'écrasante majorité des cas, le parent violent est un homme.

Tout en saluant l'initiative d'Isabelle Santiago, le président de la Civiise, Edouard Durand, s'est toutefois dit "inquiet" de modifications qui pourraient en limiter la portée. "Il faut écrire que le parent condamné pour inceste se voit retirer l’autorité parentale sauf décision contraire et spécialement motivée. Dans l'écriture actuelle du texte, sans décision expresse, cela n'aura pas lieu", craint le magistrat. "C'est conforme à nos principes et à la raison : un parent qui viole son enfant ne peut continuer à avoir l'autorité parentale sur lui", ajoute l'ex-juge des enfants.

"Cela va concerner très peu de victimes : 8% des parents dont les enfants révèlent un inceste portent plainte" et "80% des plaintes sont classées sans suite", s'inquiète aussi Isabelle Aubry, présidente de l'association Face à l'Inceste. "Pendant toute la période de l’enquête, qui peut durer des années, l’enfant est obligé d’aller chez son père où il va subir son influence et des menaces. Or si on ne le protège pas, l'enfant arrête de parler", estime-t-elle.

Le texte a été modifié en concertation avec le cabinet du garde des Sceaux pour écarter les risques d'inconstitutionnalité, fait valoir, de son côté, l'entourage d'Isabelle Santiago. "Cette proposition de loi ne concerne que les cas les plus graves. Elle ne protégera pas tous les enfants vivant dans des foyers violents, mais c'est une première marche", défend la députée.


M.L (avec AFP)

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