La grippe aviaire H5N1 progresse en France : faut-il s'inquiéter d'une transmission à l’homme ?

Publié le 13 février 2023 à 17h31

Source : TF1 Info

La grippe aviaire progresse dangereusement en France et dans le monde.
L'OMS a récemment appelé à la vigilance face à la transmission du virus à des mammifères.
Si les cas de contamination humaine sont peu nombreux, ils font l’objet d’une surveillance minutieuse.

La grippe aviaire peut-elle être à l'origine d'une nouvelle pandémie ? Alors que le virus H5N1 a conduit à abattre des dizaines de millions d'oiseaux en Europe et en Amérique, l'inquiétude au sujet d'une éventuelle transmission humaine est croissante. Le signal d’alarme a été lancé après sa détection en Espagne, dans un élevage de visons, mais la maladie a été détectée chez d'autres mammifères, notamment des renards, des loutres, des lions de mer, des grizzlis, et même un chat dans les Deux-Sèvres, contribuant à alimenter la crainte d'un risque plus élevé pour les humains.

Tout en appelant à la vigilance mercredi face à la transmission de la grippe aviaire à des mammifères, l'OMS s'est voulue rassurante à ce sujet. 

Une transmission humaine "rare et peu soutenue"

"Les récentes transmissions à des mammifères doivent être surveillées de près", a déclaré le patron de l'Organisation mondiale de la santé, Tedros Adhanom Ghebreyesus, lors d'un point de presse régulier à Genève. Mais "pour le moment, l'OMS évalue le risque pour l'homme comme faible".  Le docteur Tedros a souligné que depuis l'apparition du virus en 1996, "la transmission du H5N1 vers, et entre les humains, est rare et peu soutenue".  Pour autant, "nous ne pouvons pas supposer que cela restera le cas, et nous devons nous préparer à tout changement du statu quo". 

Il appelle les pays à "renforcer la surveillance là où les humains, les animaux d'élevage ou sauvages interagissent" et indique que son organisation discute avec des laboratoires pharmaceutiques "pour s'assurer que, si nécessaire, des vaccins et des antiviraux soient disponibles" en quantité suffisante.

Au cours des deux dernières décennies, 868 cas confirmés de H5N1 et 457 décès ont été recensés chez l'homme, selon les données de l'OMS. Quatre cas confirmés ont été recensés en 2022 ainsi qu'un décès, tandis que le mois dernier, l'Équateur a signalé le premier cas de grippe aviaire (AH5) en Amérique du Sud chez un humain : une fillette de 9 ans qui était en contact avec des volailles de basse-cour. L'état de l'enfant "s'améliore", a déclaré aux journalistes le responsable des urgences de l'OMS, Michael Ryan, ajoutant que jusqu'à présent, rien n'indiquait que d'autres personnes avaient été infectées. "Les risques peuvent être réduits" et "les gens ne devraient pas s'alarmer", a-t-il insisté.

"La menace est toujours réelle"

"La transmission de l'animal à l'homme est rare, et lorsqu'il infecte l'homme, la transmission entre humains n'est pas facile, car le virus n'est pas bien adapté", a expliqué Sylvie Briand, en charge de la prévention des épidémies et des pandémies à l'OMS. Mais, a-t-elle averti, "nous devons être vigilants pour nous assurer que la propagation chez les animaux est contenue" parce que "plus le virus circule chez les animaux, plus le risque est également élevé pour les humains". 

"À l'heure actuelle, les très rares cas de transmission entre humains du virus H5N1 sont restés épisodiques. Cependant, la menace est toujours réelle : la propagation de l'infection chez les oiseaux augmente la probabilité de l'apparition d'un nouveau virus grippal dans la population humaine" abonde l'Institut Pasteur. Or, le fait que notre système immunitaire ne soit pas protégé contre l'influenza aviaire H5N1 puisqu'il ne reconnait pas ce sous-type (différent des épidémies grippales classiques) est "en faveur d'une pandémie, une dissémination rapide et mondiale du virus" signale l'Institut. Et de préciser : "Le sous-type H5N1 a une grande capacité à muter au cours du temps, mais aussi à échanger ses gènes avec des virus grippaux appartenant à d'autres sous-types infectant d'autres espèces"

Un effet d'optique ?

S'il "n'y a pas de transmission entre des mammifères, le risque demeure faible pour les humains", relève pour sa part l'infectiologue Paul Wigley auprès du Science Media Center britannique, soulignant que les récents exemples de mammifères contaminés ne suffisent pas à s'inquiéter d'une diffusion massive chez d'autres animaux que les oiseaux. À chaque fois, il semble en effet que l'animal s'est infecté en mangeant un oiseau, et non en étant contaminé par un autre mammifère. Dans plusieurs de ces cas, le virus impliqué portait une mutation spécifique, dite PB2. Elle permet, a priori, au virus de mieux se répliquer chez les mammifères. Or, le virologue Tom Peacock, lui, rappelle que pour envisager une transmission massive à l'humain, il faudrait bien d'autres mutations que PB2. 

L'infectiologue David Heyman, appelle à éviter l'alarmiste, mettant en garde contre un effet d'optique : si l'on voit les cas s'accumuler chez les mammifères, c'est peut-être parce que l'on teste de plus en plus les animaux dans le contexte actuel. "Peut-être bien que ça durait depuis des années, sans qu'il ne se soit jamais rien produit de notable", avance-t-il.

Comment le virus se transmet-il à l'homme ?

"Comme tous les virus, l'Influenzavirus A est un parasite qui doit infecter une cellule hôte pour se multiplier. Chez les oiseaux, les cellules hôtes de l'Influenzavirus sont essentiellement les cellules du tractus digestif, tandis que chez les mammifères, ce sont principalement les cellules du tractus respiratoire", peut-on lire sur le portail pédagogique de l'Académie de Toulouse. Le principal facteur de risque de transmission à l'homme reste associé au contact direct ou indirect avec des volailles contaminées, vivantes ou décédées. "Quelques cas humains de grippe A (H5N1) ont été liés à la consommation de plats préparés avec du sang de volaille cru contaminé" précise l'OMS.

S'agissant des symptômes, le virus H5N1 peut se manifester chez l'Homme par une conjonctivite, une encéphalite, des infections des voies respiratoires supérieures (fièvre et toux), un syndrome de détresse respiratoire aigu, un choc septique, des expectorations pouvant évoluer vers une pneumonie grave ou encore des symptômes gastro-intestinaux (nausées, vomissements, diarrhée).


Audrey LE GUELLEC

Tout
TF1 Info