Conflits de voisinage à la campagne : ce que prévoit la nouvelle loi qui vise à protéger les agriculteurs

par M.D. avec AFP
Publié le 9 avril 2024 à 13h31

Source : TF1 Info

Ces dernières années, plusieurs procès atypiques mettant en cause les nuisances sonores des animaux de la campagne ont fait la Une de l'actualité.
Un texte de loi, voté au Parlement, protègera à l'avenir toute activité qui était présente avant l'installation d'un nouvel arrivant en milieu rural.

Vaches, cochons, coqs et grenouilles pourront continuer de meugler, couiner, chanter et coasser sans que leurs propriétaires risquent d'être traduits en justice. Le Parlement a définitivement adopté lundi 8 avril un texte de loi pour limiter les conflits de voisinage, notamment à la campagne, lorsque de nouveaux arrivants se plaignent des bruits ou des émanations des exploitations voisines. Celui-ci inscrit dans le code civil le principe d'une responsabilité fondée sur les "troubles anormaux de voisinage". Cette notion existait déjà dans la jurisprudence mais n'était pas codifiée.

Concrètement, un nouvel habitant n'aura plus la possibilité, à l'avenir, de se plaindre des nuisances venant d’une activité agricole qui existait avant son installation. Le texte "définit ainsi les contours de ce fameux vivre-ensemble, respectueux de chacun", a salué lundi à l'Assemblée le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti. "Si l'on choisit la campagne, on doit l'accepter telle qu'elle est", avait soutenu au Sénat le ministre de la Justice. "Ce n'est pas un blanc-seing à l'ensemble des troubles de voisinage, mais bien un dispositif de bon sens", a souligné la députée (Renaissance) Nicole Le Peih, qui est à l'origine du texte. 

Autre nouveauté, le trouble anormal de voisinage ne pourra pas être caractérisé dans le cas où les activités résultent d'une mise aux normes postérieure à l'installation de la personne s'estimant lésée, ou qu'il n'est pas constaté de "modification substantielle" de nature ou d'intensité. "Lorsqu'un éleveur de poules pondeuses est contraint de passer d'un élevage en batterie à un élevage en plein air, son activité doit évoluer de manière importante mais ne pourra pas constituer de trouble", avait défendu Françoise Gatel (UDI), rapporteure au Sénat.

Les conflits à la campagne se multiplient

Ces dernières années, plusieurs procès atypiques mettant en cause les nuisances sonores des animaux de la campagne ont fait la Une de l'actualité. Le plus emblématique reste celui du coq Maurice, sur l’île d’Oléron (Charente-Maritime), qui était accusé de pousser des cocoricos trop dérangeants. En 2019, le gallinacé était devenu le symbole d’une cohabitation tendue dans les campagnes françaises. La justice avait finalement donné raison à sa propriétaire. La même année, un coq de Margny-lès-Compiègne (Oise), nommé Coco, avait lui été contraint à l'exil après la condamnation de son propriétaire pour "trouble anormal du voisinage".

En 2020, la cour d’appel de Bordeaux avait quant à elle condamné un couple d’agriculteurs retraités à reboucher leur mare. Incommodés par le tapage nocturne des batraciens et leurs coassements incessants, une famille venue s’installer dans la maison mitoyenne avaient porté l’affaire en justice. En 2021, le tribunal d’instance de Guebwiller (Bas-Rhin) avait lui relaxé les propriétaires de Sésame, un cheval de trait dont l'odeur du crottin avait poussé des voisins à déposer plainte.  L'an dernier, un éleveur bovin dans l'Oise, Vincent Verschuere, avait lui été condamné à verser plus de 100.000 euros à six de ses voisins qui se plaignaient du bruit et de l'odeur de ses vaches.

Fin 2023, pas moins de 1300 procédures judiciaires étaient en cours en France pour des conflits liés au bruit et aux odeurs de la campagne, avait indiqué le Garde des Sceaux Eric Dupont-Moretti.


M.D. avec AFP

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