Le pouvoir d'achat des retraités a-t-il baissé ?

par Cédric STANGHELLINI
Publié le 9 octobre 2019 à 14h30, mis à jour le 9 octobre 2019 à 17h44

Source : JT 20h Semaine

À LA LOUPE - Beaucoup de retraités partagent un même sentiment : leur pouvoir d'achat aurait diminué particulièrement ces dernières années. S'agit-il seulement d'un sentiment ? Plusieurs études confirment une baisse.

La non-indexation des pensions de retraite sur l'inflation décidée pour 2019 et la hausse de la CSG durant l'année 2018 sont vécues, par de nombreux retraités, comme un coup de rabot à l'encontre de leur pouvoir d'achat. Mais s'agit-il seulement d'un sentiment ou d'une baisse réelle de leur niveau de vie ? Nous avons vérifié.  

Le niveau de vie baisse plus vite pour les retraités

L'étude la plus récente sur le pouvoir d'achat des retraités a été publiée en mars 2019 par l'Insee. Elle se concentre sur la période de janvier à octobre 2018, première année où la majorité fut entièrement au pouvoir, le bilan de 2017 étant partagé avec la fin du quinquennat de la majorité précédente. 

Quels sont les résultats ? Selon l'Insee, ce sont les ménages de retraités qui sont les grands perdants. Alors qu'entre janvier et octobre 2018, le niveau de vie de l'ensemble des Français a baissé de 0,4% en moyenne, celui des retraités a baissé lui de 2%, soit un écart de 1,6 point. 

Cette baisse de 2 % représente une perte sèche de 39 euros par mois pour les couples de retraités. Deux raisons expliquent cette diminution du pouvoir d'achat. D'une part la hausse de la CSG en 2018 est responsable d'une baisse de 27 euros. D'autre part, la hausse des prix des carburants et du fioul domestique a fait perdre 12 euros. 

Les mesures d'urgence sociale sans effet pour la moitié des retraités

L'OFCE a spécifiquement étudié la politique fiscale et sociale mise en place depuis le début du quinquennat d'Emmanuel Macron. Ce qui inclut les mesures d’urgence économiques et sociales, au moment de la crise des Gilets jaunes. L'OFCE enregistre un gain moyen de 440 euros de pouvoir d'achat pour l'année 2019 pour les Français. 

Sauf qu'une partie des retraités échappent-ils à cette embellie générale. Selon les calculs de l'OFCE, "4,8 millions de ménages ' retraités' devraient perdre à la mise en place des mesures socio-fiscales." Parmi ces 4,8 millions, les personnes à la retraite vivant seules subiraient une perte moyenne de 240 euros par an en 2019 tandis que pour les couples retraités, celle-ci atteindrait 390 euros par an en moyenne. Il s'agit de sommes significatives. 

Pourquoi les retraités échappent à ce gain de pouvoir d'achat général ? Car les mesures d'urgence économique et sociales, décidées en décembre 2018, se concentrent surtout sur les actifs. D'ailleurs, d'après les calculs de l'OFCE, l'âge moyen des ménages considérés comme les 'perdants' de la politique sociale et fiscale est de 67 ans.

Et la désindexation ?

Au 1er janvier 2019, les pensions de retraite du régime général ont été revalorisées de 0,3%. D'après le code de la sécurité sociale, la revalorisation annuelle des montants des pensions est effectuée "sur la base d'un coefficient égal à l'évolution de la moyenne annuelle des prix à la consommation, hors tabac, calculée sur les douze derniers indices mensuels de ces prix publiés par l'Insee", autrement dit : en fonction de l'inflation. Or, au 1er janvier 2019, l'Insee établissait l'inflation sur un an de 1,2%. Les pensions de retraite du régime général évoluent donc moins vite que l'inflation, c'est ce qu'on appelle une désindexation.             

Ce n'est pas la première fois que le montant des pensions ne suit pas l'évolution des prix. En 2014, Manuel Valls, alors Premier ministre, bloque la revalorisation des prestations sociales, dont les retraites, jusqu’en octobre 2015, soit un gel pendant un an. Puis en 2015, la revalorisation est de 0,1%, autant que l'inflation. En 2016, l'ancienne majorité décide d'un nouveau gel. Le 1er octobre 2017, le gouvernement d’Edouard Philippe a accordé une revalorisation de +0,8%. 

En revanche, les retraités qui perçoivent le minimum vieillesse n'ont pas été concernés par les désindexations successives. L'allocation de solidarité aux personnes âgées augmente plus vite que l'inflation après des revalorisations successives du gouvernement Philippe : de 30 euros en 2018, puis de 35 euros le 1er janvier 2019. Une nouvelle hausse de 35 euros est prévu pour 2020. 

Les nouveaux retraités toujours plus pauvres

Si le niveau de vie des seniors a constamment progressé, génération après génération, on constate désormais une stagnation chez les personnes qui arrivent à l'âge de la retraite, comme l'illustre le graphique ci-dessous.  

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Alors que les Français nés entre 1946 et 1950 ont, à 65 ans, des revenus moyens de 27.000 euros par an, ce même revenu était de 27.400 euros à 65 ans pour les Français nés entre 1941 et 1945. Constat : une baisse de 400 euros en une seule classe d'âge. 

Cette baisse du revenu moyen se poursuit pour les générations de retraités suivantes et ne laissent rien présager de bon pour les futurs retraités. Les Français nés entre 1956 et 1960 ont, à 55 ans, des revenus moyens plus bas que la génération 1951-1955. Ce qui n'est pas bon signe car le niveau de vie d'une personne diminue une fois à la retraite. Nous ne nous dirigeons pas vers une amélioration du pouvoir d'achat des retraités. 

"Retraites : Jean-Paul Delevoye face aux Français". Retrouvez "La Grande confrontation", présentée par David Pujadas, mercredi 9 octobre sur LCI (canal 26), dès 20h45.

Article initialement publié le 24 avril 2019.

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Cédric STANGHELLINI

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