"Ce n'est pas la bonne voie" : l'aile gauche de la Macronie se rebiffe contre la réforme de l'assurance chômage

Publié le 31 mars 2024 à 17h50

Source : JT 20h Semaine

Plusieurs députés de l'aile gauche de la majorité mettent en garde contre la nouvelle réforme de l'assurance chômage.
Une des options évoquées par le gouvernement est de réduire de "plusieurs mois" la durée d'indemnisation des chômeurs.
"Ce n'est pas la bonne voie", estime le président de la commission des Lois de l'Assemblée Sacha Houlié.

L'aile gauche de la Macronie multiplie les mises en garde contre le projet du gouvernement de réduire la durée d'indemnisation des chômeurs. À l'image du président de la commission des Lois de l'Assemblée Sacha Houlié, elle estime que ce n'est "pas la bonne voie". À peine les plaies de la loi immigration se referment-elles que l'exécutif et sa majorité semblent ouvrir un nouvel épisode de divisions. 

L'objet des désaccords : la nouvelle réforme de l'assurance chômage envisagée par Gabriel Attal. Celle-ci devrait prévoir une réduction de "plusieurs mois" de la durée d'indemnisation des chômeurs, actuellement de 18 mois pour les moins de 53 ans, sans aller en dessous de 12 mois. Une annonce qui intervient en plein contexte de dérapage dans les comptes publics, puisque la France a accusé un déficit de 5,5% du PIB en 2023, soit bien plus que les 4,9% initialement prévus.

Est-ce que je pense qu'il faut faire une mesure d'économie sur les chômeurs aujourd'hui ? Je ne le pense pas
Sacha Houlié

Cette lecture a cependant été vivement contestée dimanche par Sacha Houlié, sur le plateau du Grand Jury RTL/Le Figaro/M6. "Si nous réduisons la durée d'indemnisation, à quelles fins le faisons-nous ? Une mesure d'économie. Est-ce que je pense qu'il faut faire une mesure d'économie sur les chômeurs aujourd'hui ? Je ne le pense pas", a-t-il déclaré.

L'élu de la Vienne a fait valoir que l'exécutif avait déjà réformé par deux fois l'assurance chômage, en 2019 et 2023, en mettant notamment en place une mesure de "contracyclicité", c'est-à-dire que les conditions d'indemnisation se durcissent quand le chômage baisse, et s'assouplissent quand il augmente. 

Plusieurs voix discordantes

"Est-ce qu'il faut une nouvelle réforme sur ce sujet alors même qu'on constate que le chômage ne baisse plus ?", s'est-il interrogé, estimant que les "règles" étaient déjà "sévères". "À partir du moment où je constate que ce n'est pas le retour à l'emploi qui est la motivation, que ce sont des économies qui sont recherchées, je dis que ce n'est pas la bonne voie", a-t-il insisté.

Selon le président de la commission des Lois, plusieurs cadres de la majorité tiennent la même ligne face au projet du gouvernement, citant le président de la commission des Affaires économiques Stéphane Travert, le vice-président du groupe Renaissance Marc Ferracci, ou encore la députée de Paris Astrid Panosyan-Bouvet. Tous des marcheurs de la première heure.

Réduire la durée de l’indemnisation chômage des seniors serait injuste
Astrid Panosyan-Bouvet

Astrid Panosyan-Bouvet a estimé vendredi que "réduire la durée de l’indemnisation chômage des seniors serait injuste", jugeant sur X que "l'urgence n'est pas de réformer l'assurance chômage, mais de rendre attractifs les métiers qui ne le sont pas (...) et lever les freins centraux à l'emploi".

De son côté, Marc Ferracci a considéré que la "priorité" était de "toucher au critère de l'éligibilité", c'est-à-dire le nombre de mois travaillés pour être indemnisé. "Après, si le gouvernement veut toucher à la durée, il aura l'occasion de le faire", a-t-il évacué jeudi sur France 2. 

Clément Beaune a exprimé ses réserves

Dimanche, un autre tenant de l'aile gauche a pris ses distances : Clément Beaune, ancien ministre des Transports, écarté du gouvernement en janvier après avoir exprimé ses réserves sur la loi immigration. "Nous devons être prudents et cohérents", a-t-il souligné sur France Info, appelant à être "plus protecteur" car "le marché du travail va moins bien". Il a aussi reconnu qu'il existait un risque de précariser les plus fragiles "si on allait vers des paramètres qui sont trop durs".

"Gabriel Attal n'a jamais présenté cette réforme comme une mesure d'économie" mais comme "une mesure pour dynamiser les recettes", assure en retour un conseiller de l'exécutif, notant que le Premier ministre avait pris soin de rassembler des députés de la majorité, dont certains de l'aile gauche, avant de lancer ses pistes au JT mercredi. 

"Ceux qui étaient présents étaient plutôt à l'aise sur le projet", affirme le même conseiller, circonscrivant les divergences à "une minorité au sein du groupe". Un travail de conviction que le Premier ministre répètera mardi, en se rendant devant les députés Renaissance. Espérant ne pas ajouter la menace d'un front politique au front social.


Rania HOBALLAH

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