"Chaque agent a des objectifs à atteindre" : ces primes que les contrôleurs SNCF et RATP touchent quand ils mettent une amende

Publié le 13 mars 2024 à 16h07

Source : JT 13h Semaine

Dans les trains, le contrôle des titres de transport peut rapidement être rentable pour... les contrôleurs eux-mêmes.
Selon des informations du "Parisien", confirmées à TF1info, chaque contrôleur perçoit une partie du montant de l'amende dressée.
Une politique défendue par la SNCF comme la RATP.

Les contrôleurs sont-ils rémunérés en fonction des procès-verbaux qu'ils parviennent à dresser ? En partie. Selon des informations de nos confrères du Parisien, confirmées à TF1info, chaque fraudeur participe directement à la rémunération de son contrôleur. Ces derniers touchent en effet un pourcentage du montant de l'amende, à la condition qu'elle soit payée sur place, et non plus tard (ce qui évite des frais de dossier à la charge du voyageur).

Un dispositif actuellement en vigueur du côté de la SNCF comme de la RATP. Les deux entreprises ont, depuis plusieurs années, mis en place une politique financière incitant leurs agents à atteindre des objectifs dans la lutte contre la fraude.

"Quelques dizaines d'euros" chaque mois, selon la SNCF

"La fraude représente 200 millions d'euros de manque à gagner par an pour SNCF Voyageurs", souligne le groupe public interrogé par TF1info. "Comme pour toute priorité, il est naturel qu'il y ait des incitations pour les salariés." Ainsi, 4 à 10% du montant de l'amende, en fonction des situations, termine dans la poche du contrôleur si elle est payée immédiatement.

Une politique largement contestée sur les réseaux sociaux, où plusieurs cas de contraventions jugées abusives ont circulé ces derniers jours, que la SNCF entend toutefois tempérer. Ces primes "existent depuis longtemps" et "représentent une part minime de la rémunération d'un chef de bord", insiste l'entreprise, qui les chiffre à "quelques dizaines d'euros par mois pour un chef de bord TGV ou TER". En revanche, elles peuvent être "plus importantes" pour les équipes "quasiment dédiées à la lutte anti-fraude, par exemple sur le réseau Île-de-France".

Un moyen aussi pour la SNCF d'inciter les chefs de bord à contrôler l'ensemble d'un train. "Chaque agent a des objectifs à atteindre", nous indique l'un des syndicats représentés dans l'entreprise. "Pour les chefs de bord, l'objectif n'est pas de dresser le plus de procès-verbaux possibles, mais de contrôler un maximum de clients par train. Leur hiérarchie les suit en fonction du nombre de contrôles effectués, pas sur le nombre de PV."

À la RATP, des primes réparties par équipe

Du côté de la RATP, la donne est similaire. Au sein du réseau ferré (métro et RER), les agents des gares et des stations fonctionnent par équipes. Un panier total équivalent à 10% du montant des amendes qu'ils parviennent à dresser et qui sont payées sur place est redistribuée à l'équipe et répartie entre chaque agent, confie une source syndicale à TF1info, confirmant des informations du Parisien. "Lorsqu'un voyageur en infraction régularise sa situation immédiatement, [...] l'agent concerné perçoit une prime égale à 10% du montant de cette indemnité forfaitaire", est-il ainsi écrit dans un document interne à la RATP, selon cette source.

Une prime alléchante, d'autant que ces agents n'ont pas le contrôle des voyageurs comme unique mission. "Ils sont notamment choisis en fonction de leur implication dans le rôle de contrôleur", poursuit cette même source. "En somme, ce qu'ils sont capables de ramener en termes de chiffres. C'est très pernicieux : même s'ils n'ont pas un nombre d'amendes à dresser chaque jour, leur mission se traduit via un complément de salaire."

Contactée par TF1info, la RATP assume cette politique. "Les agents dédiés à la fraude bénéficient d'une prime collective, dépendant de leurs activités, dont les verbalisations dressées font partie", explique le groupe ferroviaire. "Cette dernière est identique pour l'ensemble de l'équipe, composée en moyenne de trois agents, afin de privilégier le bon sens collectif."

L'entreprise fait aussi en sorte d'inciter les voyageurs en situation de fraude à payer leur contravention sur place, auprès des agents. "Le Code des transports a réévalué de cinq euros les frais de dossier ajoutés en cas de PV, ce qui favorise le paiement immédiat", poursuit-elle, précisant surtout "répondre à un principe de justice : ceux qui payent n'acceptent pas que certains ne payent pas."


Idèr NABILI

Tout
TF1 Info