Payer plus mais avoir moins : avec les cours à distance, la colère gronde dans les écoles de commerce

Publié le 19 novembre 2020 à 18h03
Ecole Kedge, Bordeaux
Ecole Kedge, Bordeaux - Source : GEORGES GOBET / AFP

À DISTANCE - Des élèves d’écoles de commerce plaident pour le remboursement partiel de leurs frais de scolarité, via une pétition signée par près de 20.000 personnes. Les établissements refusent pour l'heure d’accéder à leur demande.

Cette rentrée scolaire a été marquée par une reprise de la circulation du virus en France, obligeant les établissements à s’adapter et renvoyer leurs étudiants à des cours dispensés en visio-conférence. Si bien que de nombreux élèves issus d’écoles de commerce, parmi les plus onéreuses de l’enseignement supérieur, demandent un remboursement partiel de leurs frais de scolarité. 

"Le déroulement de ce début d’année avec une mise en place massive des cours à distance, difficile à suivre, décourageant, corrélé à une incessante hausse des frais de scolarité des écoles de commerces poussent nombre d’élèves à s’interroger sur la légitimité du montant payé", avancent-ils dans une pétition, mise en ligne le 10 novembre et ayant rassemblé près de 19.000 signatures à ce jour. 

Des frais de scolarité toujours plus hauts

"Nous payons plus cher que nos prédécesseurs pour des cours de moins bonne qualité", plaident encore les signataires. Et de fait, la hausse des frais de scolarité est bien réelle pour plusieurs de ces écoles, obligeant la plupart des élèves à contracter un prêt pour accéder aux enseignements. 

En septembre dernier, le site L’Étudiant dressait un comparatif entre 2016 et 2020 et constatait une augmentation de 40% pour l’école Skema (de 10.040 à 14.000 euros par an), de 34% pour l’école Audencia (de 10.633 à 14.197 euros par an), ou encore de 17% pour HEC Paris (de 13.500 à 15.850 euros par an). En dix ans, selon Les Échos, les frais de scolarité ont même quasiment doublé dans la majorité des grandes écoles de commerce.

Nous avons juste la sensation d’être des vaches à lait
Un père de famille signataire de la pétition

"J’ai payé 15k (15.000 euros, ndlr) à Skema alors que je n’ai assisté qu’à quelques séances en présentiel", témoigne un étudiant en dessous de la pétition à laquelle il vient d'adhérer, tandis qu'un autre s’indigne : "Nous payons plus pour recevoir peu, l’inadéquation entre l’offre et la demande est donc clairement à prendre en compte". 

Pour un troisième élève, "l’enseignement en ligne reste bien moins efficace qu’en présentiel malheureusement et ne justifie pas (...) des frais de scolarité aussi élevés". Parmi les signataires, des étudiants donc, d'anciens élèves venus en soutien, mais aussi des parents désabusés : "75% des cours en présentiels pour l’école de ma fille sont un leurre. (...) Nous avons juste la sensation d’être des vaches à lait, on paye pour des prestations qui ne sont pas honorées."

Plus cher d'enseigner à distance ?

La réponse des établissements n'a pas tardé à arriver. Dans une lettre ouverte publiée le 12 novembre, les grandes écoles de commerce ont d’ores et déjà rejeté la demande formulée par leurs étudiants. "Si nous devions réduire les frais de scolarité, cela reviendrait à dire que tout ce qui est mis en place par les écoles doit s’arrêter et que la promotion des étudiants actuels sera véritablement sacrifiée puisque les recruteurs ne les embaucheront pas. C’est impossible à envisager pour nos établissements", argumente la Conférence des grandes écoles (CGE).

"Contrairement à ce qu’on pourrait penser, les cours à distance ne coûtent pas moins cher que les cours en présentiel. Ils coûtent même plus cher, et le surcoût n’a pas été répercuté dans les frais de scolarité", poursuit la CGE, pointant l’investissement massif des écoles "dans des nouvelles technologies éducatives, dans le réaménagement de leurs espaces pédagogiques" ou dans la formation des professeurs depuis le premier confinement "pour délivrer des cours, d’abord hybrides, puis à distance de très bonne qualité". 

Au printemps dernier déjà, des voix s’étaient élevées en ce sens et plusieurs élèves avaient tenté d’obtenir le remboursement partiel de leur année scolaire, perturbée par le confinement strict de la population. Au sein de certaines écoles, des initiatives solidaires s’étaient alors mises en place assez tôt. En mars, la Fondation HEC avait notamment créé un fonds de solidarité pour "les besoins immédiats des plus fragiles", les étudiants boursiers en premier lieu. À ce jour, 150 étudiants ont pu bénéficier de bourses, selon la Fondation.


Caroline QUEVRAIN

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